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Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 9.djvu/963

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quasi indomptable, et qui conservera ses idées, ses mœurs et sa langue. Sur ce dernier point, les Anglais ont dû faire une concession significative. Il y a quelque temps, un impérialiste fougueux écrivait au Times pour demander la proscription de la langue hollandaise dans les deux républiques, afin de ne pas commettre, disait-il, la même faute qu’au Canada, où l’on a laissé le français se perpétuer. Et nous demandons à qui et à quoi cela a fait du mal, au Canada. En tout cas, il a été formellement stipulé dans le traité que le hollandais serait enseigné aux enfans dans les écoles si les familles le demandaient, et on peut être sûr qu’elles le demanderont toutes. De plus, on pourra en faire usage dans les tribunaux lorsque cela paraîtra utile à la bonne administration de la justice, et il en sera certainement ainsi pendant de longues années. Les Boers seront sujets anglais, mais ils resteront Boers. Matériellement, les Anglais ont fait un effort considérable et honorable en vue d’atténuer les maux de la guerre. Ils mettent à la disposition des Burghers une somme de 75 millions de francs pour la reconstitution des fermes et la reconstitution des outils de travail, des cheptels, etc. De plus, ils s’engagent à faire des avances ou prêts sans intérêt pendant deux ans, et à 3 p. 100 après ce terme. Il faut désirer, et nous souhaitons vivement, que ces ressources suffisent pour ramener dans le pays, non pas la richesse, qui n’y a d’ailleurs jamais été, mais enfin la possibilité de vivre en travaillant.

La question des révoltés du Cap, des Afrikanders qui ont pris les armes pour aller au secours des deux républiques, était plus délicate. Le gouvernement anglais ne pouvait traiter, ni directement avec des rebelles, ni avec les Boers à leur sujet ; et, d’un autre côté, les Boers ne pouvaient pas abandonner des gens qui s’étaient compromis pour eux. On a pris le parti de donner connaissance aux négociateurs boers des intentions du gouvernement du Cap à l’égard des rebelles. Il n’est pas douteux que le fond et la forme de cette démarche avaient été, comme le traité lui-même, l’objet de négociations entre les deux parties : mais, pour sauver les convenances britanniques, lecture a été faite officiellement aux Boers d’une déclaration en apparence spontanée. Les conditions obtenues pour les Afrikanders sont d’ailleurs très rigoureuses. Les rebelles ont été distingués en deux catégories. Ceux de la première sont le menu peuple, les simples soldats : ils devront reconnaître par leur signature qu’ils se sont rendus coupables de haute trahison, et la peine dont ils seront frappés consistera à être privés à perpétuité du droit de prendre part à toute élection politique ou municipale. Les rebelles de la seconde catégorie sont les officiers