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cause de la défection des Littré et des Robin, le point essentiel qu’il n’a, pour sa part, jamais abandonné. Ce sont en tout les exigences morales qui doivent passer les premières, parce qu’elles sont en effet les premières qui puissent assurer la durée de l’organisation sociale. « Le perfectionnement ne saurait consister uniquement à dissoudre l’ancienne discipline, » a-t-il encore dit avec une force et une concision qui ne lui sont pas habituelles ; et ailleurs : « Pendant les cinq siècles de l’anarchie occidentale, le désordre de l’esprit a de plus en plus affecté le cœur. C’est d’après celui-ci qu’il faut définir la maladie révolutionnaire, consistant en une surexcitation continue de l’orgueil et de la vanité, par suite d’une tendance, éminemment contagieuse, vers l’infaillibilité personnelle. Ainsi se trouve compromis le principal résultat de l’ensemble du régime théologique : le développement de la vénération, seule base de la discipline et garantie nécessaire des autres instincts sympathiques. » [VIe Circulaire, Robinet, p. 513.] C’est encore une déclaration dont on ne méconnaîtra pas l’intérêt ; — et sur laquelle je n’insisterai pas aujourd’hui, sauf à la développer dans une dernière étude. Si toutes les « religions » sont des « sociologies, » et si les « sociologies » conditionnent toutes une « morale » et sont à leur tour conditionnées par elle, c’est ce qu’il me reste à examiner. Je le ferai prochainement, en essayant d’expliquer, pour cela, ce que l’on veut dire quand on dit que « les questions sociales sont des questions morales, » et « les questions morales des questions religieuses. »


FERDINAND BRUNETIERE.