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bruit, et d’aucuns affectèrent de voir un geste à la Polyeucte :


Je vois, je sais, je crois, je suis désabusé.


dans une gaminerie qui n’avait d’autre but que de mettre en posture plaisante quatre chasubles tchèques. La popularité des petites feuilles de la Ligue évangélique s’en accrut. Ainsi se préparait, dans l’Allemagne protestante, un travail d’attaque contre Rome, qui coïncidait avec les soubresauts de MM. Wolt et Schœnerer ; plusieurs rendez-vous entre pangermanistes d’Autriche et pasteurs allemands attestèrent que la coïncidence n’avait rien de fortuit, et que, par-dessus la pittoresque barrière de la Suisse saxonne, une action commune allait commencer.

On fêtait à Plauen, en Saxe, le 3 septembre 1898, l’anniversaire de Sedan : des hommes politiques d’Autriche accoururent ; ils se rencontrèrent avec un pasteur de Thuringe, M. Bräunlich, qui venait d’inaugurer dans une librairie bavaroise une série de brochures sur la décadence de l’influence romaine dans les divers pays. Un « comité pour le mouvement évangélique en Autriche, » créé en octobre par la Ligue évangélique, fut le fruit de ce premier entretien. On se revit à Teplitz, le 11 novembre ; et M. Bräunlich, après un regard sur cette Bohême dont la Réforme ferait peut-être une terre allemande, rejoignit la Saxe. Il rapportait « de Chanaan des grappes de grandes espérances, » et concluait qu’il fallait, tout de suite, porter de bourgade en bourgade la bonne nouvelle de l’Evangile allemand, telle que Guillaume II son souverain, cet apôtre couronné, l’annonçait, à cette époque même, sur l’auguste terre des Lieux Saints, en inaugurant une Eglise évangélique. Jérusalem devenait une seconde Wartbourg ; Berlin rendait au Christ un vicaire temporel ; l’heure était solennelle ; on devait agir.

Une Pentecôte a besoin d’un cénacle : M. le surintendant Meyer, de Zwickau, président du comité pour l’Eglise évangélique en Autriche, descendit jusqu’à Eger ; et là, dans une chambre historique où Guillaume Ier, en 1866, se reposa quelques heures des victoires qu’il venait de remporter sur l’Autriche, M. Meyer eut avec les pangermanistes autrichiens la conversation décisive. La grande ombre du vainqueur de Sadowa planait sur le colloque : elle recevait l’obédience des sujets de François-Joseph, sous la bénédiction des pasteurs allemands ; et M. le député Eisenkolb se sentait à un tournant de l’histoire du