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l’héritier des Stuarts. « Avec une dépense bien moindre que celle qu’il fit pour bâtir et décorer Versailles et Marly, il réussit à faire de l’Angleterre, durant près de vingt années, un membre aussi insignifiant du système politique de l’Europe que la république de Saint-Marin. » La constatation de Macaulay est exacte, dans son ensemble, mais l’étude attentive des relations de la France et de l’Angleterre permet de distinguer diverses étapes dans cette diplomatie et d’y reconnaître l’influence de la duchesse de Portsmouth.

Dans une première période qui s’étend jusqu’au traité de Nimègue, Louis XIV, à qui Charles II est uni par le traité secret qui a suivi celui de Douvres, s’efforce, par l’intermédiaire de ses ambassadeurs, de retenir le plus longtemps possible le monarque anglais dans son alliance ; lui distribue des subsides, d’ailleurs fort chichement marchandés, pour éviter les réunions du Parlement ; et arrive, en grande partie par l’ascendant de la duchesse, à conclure la paix de Nimègue sans que l’Angleterre ait sérieusement pris les armes contre lui.

Mais, mécontent des concessions que son ancien allié a dû faire à son peuple, des persécutions contre les catholiques et du mariage d’Orange, Louis XIV revient ensuite à la politique de défiance. Et pendant plusieurs années, malgré les instances de la duchesse de Portsmouth, au lieu de conclure un traité de subsides avec le souverain anglais, il s’efforce de maintenir l’agitation dans le royaume en distribuant de l’argent à l’opposition dynastique, voire même au parti républicain. Le résultat de cette politique, conseillée par Barillon, et qui désole la duchesse, est le rapprochement momentané de celle-ci et du parti whig, le relâchement de son amitié avec la France, la menace de la reconstitution d’une triple alliance entre l’Angleterre, l’Espagne et les Provinces-Unies.

Toutefois Louis XIV reconnaît son erreur. Le traité secret de subsides de mars 1681, qui permet à Charles II de vivre sans Parlement et qui est regardé en général comme le triomphe de la politique française, est beaucoup plus exactement celui de la politique particulière de la duchesse de Portsmouth, qui voit enfin se réaliser l’union intime qu’elle a essayé de consolider depuis son entrée en faveur, qu’elle n’a pu établir définitivement en 1679, à laquelle maintenant elle va présider. C’est elle qui, plus que Barillon lui-même, devient l’intermédiaire