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comme le principal fondement de l’autorité royale en Angleterre, mais aussi comme le lien le plus indissoluble de notre amitié. C’est ce qui me fait vous dire en confidence que j’ai appris avec joie par les lettres du sieur Barillon que le roi mon frère est disposé à donner au duc d’York la satisfaction qu’il lui demande de pouvoir entrer dans le conseil secret, et que vous me ferez plaisir d’y contribuer en tout ce qui peut dépendre de vous, étant bien persuadé que ce bon concert ne peut être qu’avantageux aux affaires du même roi. Vous ne le devez pas être moins de l’estime que j’ai pour vous. » L’intervention de la duchesse ne tardait pas à produire le résultat désiré, et dès le 18 juillet, Louis XIV lui témoignait toute la satisfaction qu’il en éprouvait : « Ma cousine, j’ai vu avec plaisir, par votre lettre du 10 de ce mois, que ce que je vous avais témoigné souhaiter pour l’établissement d’une solide et parfaite union entre la roi de la Grande-Bretagne et le duc d’York ait eu un aussi prompt succès que je le pouvais attendre de vos bonnes intentions et de votre adresse. Je m’assure aussi que les marques éclatantes de la bonne intelligence qu’il y a dans la maison royale d’Angleterre ôtera toute espérance à ceux qui ont formé de si pernicieux desseins contre elle d’y pouvoir réussir, et je serai bien aise que vous continuiez d’employer vos soins à maintenir cette union dont je vous saurai d’autant plus de gré que je la considère comme le fondement de l’amitié que je veux toujours entretenir avec le roi mon frère. »

D’ailleurs tous ont pour la duchesse la plus grande déférence. Quand le duc d’York songe à marier Anne, sa deuxième fille, c’est elle qu’il consulte sur le choix d’un époux. C’est elle qui se charge de savoir l’opinion de Louis XIV sur le prétendant en vue, le prince Georges de Danemark, et qui envoie au roi de France le portrait de la jeune princesse. En retour de ses bons offices, le roi de Danemark lui offre son propre portrait garni de gros diamans : « Ceux qui prétendent s’y connaître disent qu’il vaut 1 500 guinées. »

Quand l’entrée brusque, sans avis préalable, de la flotte française dans la Manche émeut l’opinion politique en Angleterre, c’est la duchesse qui engage Charles II à éviter toute apparence de froissement, afin que nul ne tire argument de cet incident contre l’alliance française. D’accord avec Barillon, elle surveille tous les détails des rapports des deux pays. En une circonstance