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salut du peuple[1]. Ni les écoles primaires ni les School Boards n’étaient satisfaisans. Le mérite de la nouvelle loi, c’est de mettre l’éducation sous le contrôle local, et de la faire dépendre du zèle de ce contrôle. L’influence de l’Eglise dans les écoles libres, maintenues désormais par des taxes locales, est grande assurément, mais elle ne continuera pas à l’être ; car le contribuable, dans ce pays, a l’habitude d’examiner silencieusement l’emploi de son argent, et s’il le veut, la loi lui en fournit les moyens, grâce à la surveillance que les corps municipaux exerceront sur ces écoles. L’échec du Bill eût retardé la réforme de dix ans, et les libéraux eussent été incapables de l’accomplir intégralement. Les ministres ont agi comme éducateurs et comme courtiers entre les éducateurs et l’Eglise. Ils ont payé à l’Eglise le prix de son assentiment. Mais l’agitation politique qui en résultera amènera un progrès dans le sens de l’égalité religieuse et d’une éducation encore meilleure.

Ecoutez maintenant M. Sidney Webb, socialiste d’Etat et impérialiste, l’un des maîtres de l’Ecole des sciences politiques et économiques de Londres. L’Education Act de lord Salisbury et de M. Balfour n’a pas d’apologiste plus convaincu, plus optimiste. Le Bill, écrit M. Sidney Webb, constitue un progrès immense. Pour la première fois, il traite de l’instruction prise dans son ensemble. Il a fallu bien des efforts pour que la loi permette aux autorités locales de dépenser de l’argent en vue de l’instruction publique. Encore aujourd’hui maint vieux gentleman considère que c’est porter atteinte à la Constitution que de faire appel au Trésor pour les Universités.

L’Education Act ouvre une ère nouvelle. Jusque-là l’éducation était considérée comme une affaire privée : elle devient une affaire publique, en tant qu’éducation, sans qu’on y mette aucune limite de sexe, de classe, de sujet, de grade. Le Bill une fois devenu loi, le conseil élu de Liverpool, par exemple, est responsable de l’éducation de 500 000 habitans, éducation dont une partie est un service obligatoire. Il peut dépenser chaque année ce qui lui plaît en œuvres d’éducation supérieure, révolutionner l’instruction des maîtres, établir des classes de commerce, d’éducation secondaire pour les garçons et les filles, des écoles normales

  1. Voir Education and Empire, Murray 1902, lectures d’un haut intérêt par la comparaison que l’auteur, si compétent en la matière, établit entre l’éducation anglaise et le système allemand, si avantageux, au point du vue industriel.