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Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 14.djvu/874

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définition, car le mode d’application est singulièrement variable ; dans certaines régions, la charrue correspond à une étendue de terre différente suivant les contrées ; dans d’autres, on comprend sous cette dénomination l’instrument lui-même, de forme européenne ou indigène, et on lui applique un tarif variable suivant qu’il est attelé de bœufs, de chameaux, de mules ou d’ânes. Ici l’impôt varie suivant la qualité de la récolte ; là il est fixe, comme l’impôt foncier de la métropole. Dans la province de Constantine, où prévaut ce dernier système, le tarif de l’achour peut être réduit jusqu’au quart, suivant les régions. Enfin, sur certains points du territoire, notamment à Alger et à Oran, on impose des charrues supplémentaires pour les récoltes de printemps, tandis que sur d’autres, on taxe les plantations d’arbres, figuiers, amandiers, etc. La caractéristique de cet impôt, c’est qu’il ne porte que sur l’indigène ; si un Arabe, jouissant d’une propriété individuelle, délimitée conformément à la loi de 1873, vient à la vendre à un Européen, l’impôt s’éteint : inversement, si un Européen vend une terre à un indigène, celle-ci devient immédiatement imposable. La propriété européenne, par le fait de la colonisation, ayant une tendance constante à se développer au détriment de la propriété indigène, et étant d’autre part exempte de toute charge fiscale, l’extension de la colonisation a pour conséquence légale la diminution du produit de l’impôt.

L’hockor, spécial à la province de Constantine, est imposé, par charrue attelée, aux indigènes qui cultivent les terres dites azels, c’est-à-dire celles qui, appartenant autrefois au domaine beylical, étaient concédées aux populations moyennant redevance. Lorsque le sénatus-consulte de 1863 eut concédé aux indigènes la propriété des terres qu’ils occupaient de temps immémorial, l’hockor aurait dû disparaître, car les droits du beylick disparaissaient ipso facto ; à plus forte raison aurait-on dû le supprimer au fur et à mesure de la constitution des propriétés individuelles. Il n’en a rien été ; on voulait bien prendre ces mesures dans l’intérêt apparent des indigènes, mais on entendait ne les appliquer qu’au profit des Européens ; c’est ainsi que l’Arabe devenu propriétaire n’en continue pas moins à payer la location de sa terre. S’il la vend à un Européen, l’impôt s’évanouit ; mais à l’inverse de ce qui se passe pour l’achour, si plus tard un Européen revend la même terre à un indigène, l’impôt reste définitivement supprimé. Il est étonnant que les Arabes, si avisés