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détériorée par l’humidité et, comme les fonds destinés au payement des voituriers furent vite épuisés, le travail dut être suspendu.


IX

Pendant ce temps, la flotte anglo-hollandaise de Rooke, qui s’était présentée devant Cadix avec l’espoir d’y fomenter aisément une rébellion contre le gouvernement de Philippe V, y avait trouvé un accueil bien différent de celui auquel elle s’attendait. Les troupes descendues à terre essuyèrent une perte si considérable qu’elles furent obligées de se rembarquer. Ayant ainsi échoué dans son entreprise, l’armée navale ennemie avait levé l’ancre vers le milieu de septembre et retournait en Angleterre quand son chef apprit, d’une façon presque fortuite, l’arrivée des galions.

En passant à hauteur de Lagos, Rooke eut l’idée d’y détacher l’un de ses vaisseaux pour prendre langue. Le capitaine de ce bâtiment connut ainsi la présence de Château-Renault dans la rivière de Vigo et rejoignit en toute hâte l’amiral anglais, impatient de lui annoncer cette importante nouvelle[1]. L’attaque des galions parut à Rooke une entreprise dont le succès compenserait largement son échec devant Cadix et, quoiqu’il eût déjà dépassé le cap Saint-Vincent, il n’hésita pas à rebrousser chemin pour la tenter.

La flotte ennemie entra dans la baie le 22 octobre au matin, « par un temps si obscur[2] » qu’elle fut prise tout d’abord pour « le convoi de vivres attendu de la Corogne[3]. » Elle put ainsi s’avancer jusqu’à dépasser le travers de Vigo malgré le canon de cette place et vint « mouiller du côté nord à une lieue de nos batteries[4], » s’étendant ainsi depuis la pointe de Thys jusqu’à Cangas. Rooke employa la plus grande partie de cette journée à ranger les quatre-vingts vaisseaux composant son armée, se bornant à faire reconnaître l’estacade par une frégate qui dut aussitôt se replier sous le feu des ouvrages établis au

  1. Gazette d’Amsterdam, 20 novembre 1702.
  2. Mémoires de Lamberty, t. II, p. 250.
  3. Château-Renault à Blécourt, 28 octobre 1702. — Archives des Affaires Étrangères.
  4. Ibid.