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votant, le Parlement français eût été bien inspiré si, faisant un sérieux examen de conscience, il se fût astreint à une discipline analogue. Une autre disposition, non moins curieuse, limite les pouvoirs financiers du conseil supérieur ; il peut adopter ou rejeter les décisions prises par les délégations, mais n’est pas compétent pour les modifier. Est-ce là une réminiscence du rôle dévolu sous le premier Empire au Corps législatif ? A-t-on espéré faire du conseil supérieur une assemblée de muets, ce qui serait d’une impossibilité radicale sous une telle latitude ?

Après ces sages prescriptions, les auteurs de la loi nouvelle ont prévu le cas où les budgets présenteraient des excédens de recettes, et ils ont décidé que ces excédens seraient versés dans une caisse de réserve dont le montant sera partagé avec l’Etat lorsque son actif aura atteint la somme de 5 millions. Pour qui connaît la situation actuelle de l’Algérie, ces dispositions ne sont évidemment qu’un trait de haute ironie, qui avait sa place toute marquée dans les bons conseils donnés par des maîtres aussi experts en matière d’ordre financier que les membres de notre Parlement.

Enfin, un dernier article de la loi stipule qu’à partir du 1er janvier 1926, toutes les avances aux compagnies de chemins de fer, au titre de la garantie d’intérêts, demeureront à la charge de la colonie. C’est là, croyons-nous, l’une des plus médiocres dispositions de la loi nouvelle ; sans doute, on peut espérer que le développement continu de la colonie aura considérablement diminué dans 23 ans le poids de la garantie d’intérêts. Mais fût-elle réduite vers cette époque à 3 ou 4 millions, ce n’en sera pas moins une lourde charge imposée brusquement à la colonie, et il faudra que, dans cet intervalle, l’éducation des assemblées locales ait été portée à un haut degré de perfection pour les amener à prévoir de longue main les ressources destinées à faire face à cette dépense, car la prévoyance n’est généralement pas l’apanage des heureux peuples qui vivent exempts de soucis sous un ciel toujours radieux.

Peut-être pourrait-on signaler aussi quelque imprudence dans l’inscription pour mémoire au budget de 1901 du crédit destiné à la constitution du fonds des retraites destiné à fournir les moyens de pourvoir ultérieurement aux pensions à accorder aux fonctionnaires de la colonie. Mais la loi du 19 décembre 1900 est l’œuvre d’optimistes, et nous ne voudrions pas paraître jouer