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Mécontent de ne pas recevoir de renseignemens plus utiles, le ministre, Bouchotte, écrit en marge de cette lettre[1] : « Une des choses les plus importantes de la mission des agens du conseil est de prendre des renseignemens, et surtout près des soldats, sur les officiers qui ne méritent pas la confiance publique et sur ceux qui ont du patriotisme et de la loyauté. — Écrives une circulaire là-dessus aux agens. » (Dépôt de la Guerre, armée des Alpes.)

Le 23 octobre[2], deux autres agens, Bruslé et Verzade, qui opèrent à Nice, écrivent au ministre de la Guerre :

« Nous venons de recevoir la lettre par laquelle vous nous demandés de nous informer auprès des soldats de tous les officiers à destituer et à avancer. Nous nous concerterons avec les patriotes du club, qui est en grande partie composé de soldats, pour satisfaire promptement à votre demande !… »

La Terreur prend fin avec Thermidor. Pendant cette sombre période, la politique du Comité de salut public s’est inspirée de Machiavel ; elle a tout sacrifié, personnes, liberté, justice, à l’intérêt de l’État, au salut de la Patrie. Tout a plié sous ses ordres. Aux armées, les généraux se sont vus placés dans une cruelle alternative ; certains d’être guillotinés s’ils n’exécutaient pas à la lettre les ordres qu’on leur donnait au nom du Comité de salut public, ou s’ils ne réussissaient pas en les exécutant, ils se sont résignés à obéir, et ils l’ont fait avec une énergie, une vaillance sans pareilles.

La direction des opérations leur a échappé. Elle a appartenu exclusivement, pendant la Terreur, au Comité de salut public et à ses représentans. Le grand principe de l’unité de direction, qui seul permet de réussir à la guerre, n’a donc pas été violé. Mais que seraient devenues nos armées, si, au lieu de la guerre lente de l’époque, de la défensive, les adversaires de la France avaient appliqué les principes énergiques d’offensive hardie, violente, qui ont été mis en relief deux ans plus tard, dans l’immortelle campagne de 1796, par le jeune officier d’artillerie inventé, au siège de Toulon, par les représentans du peuple ? Devant des situations qui, au lieu de rester les mêmes pendant

  1. Ces lettres, comme toutes celles que nous citons sur cette époque, sont extraites de l’ouvrage de M. Wallon : les Représentans du peuple en mission en l’an II. Les documens sur lesquels s’appuie M. Wallon, existent soit aux Archives nationales, soit au Dépôt de la Guerre, soit au Moniteur. M. Wallon en indique le classement exact.
  2. Ces lettres, comme toutes celles que nous citons sur cette époque, sont extraites de l’ouvrage de M. Wallon : les Représentans du peuple en mission en l’an II. Les documens sur lesquels s’appuie M. Wallon, existent soit aux Archives nationales, soit au Dépôt de la Guerre, soit au Moniteur. M. Wallon en indique le classement exact.