Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 15.djvu/814

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ces chefs doivent avoir été prévenus, à l’avance, de la haute mission qui leur est réservée. Il est indispensable de leur donner le temps et les moyens de réfléchir, de se préparer à leur grand rôle. Toutefois, pour sauvegarder les intérêts de la France, qui sont si gravement engagés par ces désignations ; pour ménager les susceptibilités de notre régime républicain ; pour conserver le stimulant de la liberté entière du choix du gouvernement, il paraît indiqué de ne donner, pendant la paix, qu’un caractère provisoire aux désignations des chefs d’armée, et de laisser au gouvernement la faculté de les examiner, et de les remanier, s’il le juge nécessaire, au début de chaque année.

La désignation la plus grave est celle du commandant en chef des armées du Nord-Est, responsable de la conduite des opérations sur le théâtre principal, décisif de la guerre ; de celui qui est appelé « le généralissime, » peut-être avec raison, puisqu’il est sans contredit le premier de nos généraux, puisque le sort du pays dépendra de sa valeur et de son énergie.

Rien ne saurait être négligé pour entourer cette désignation de toutes les garanties possibles, et pour grandir, dès le temps de paix, tout en ne lui donnant qu’un caractère provisoire, la situation et l’autorité du chef appelé à jouer un pareil rôle.

Il doit être consulté nécessairement sur le choix de son major-général, et sur celui de ses lieutenans, les commandans d’armée. Pour ceux-ci, — l’histoire de nos guerres le montre surabondamment, — l’activité physique, jointe, bien entendu, aux autres qualités nécessaires, doit être une condition indispensable. Ils en ont besoin, plus encore que les commandans de corps d’armée eux-mêmes, en raison de l’étendue de leur champ d’action.

Comme eux, le généralissime aura besoin d’activité physique ; mais il devra surtout se distinguer par ses hautes qualités de jugement, de bon sens, d’intelligence, et par-dessus tout de caractère, de force d’âme, de volonté. Le jour où nous aurions trouvé l’officier général présentant ces garanties à un très haut degré, et inspirant une entière confiance, il serait déplorable de le voir enlever à ses fonctions par la limite d’âge. Le gouvernement doit avoir le droit de le conserver, tant qu’il le juge utile pour le pays.

Il importe aussi de remarquer que le sort de la nation ne peut pas être laissé à la merci de maladies et d’accidens ; et que par