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Qu’il me soit permis d’ajouter : on ira en France, et on aura raison.

Nul pays, en effet, n’offre, dans un espace relativement étroit, une pareille variété de beautés naturelles unie à une semblable profusion de monumens de l’histoire et de l’art. Si l’on aime la montagne, on n’a pas seulement les Alpes de Savoie ou du Dauphiné, égales, sinon supérieures, aux Alpes suisses ; on peut hésiter entre elles et les Pyrénées, comme on peut choisir entre les cimes arrondies des Vosges, que les sapins centenaires revêtent d’un manteau royal, et les puys volcaniques de l’Auvergne, autour desquels rayonnent les vallées vertes, écrins de velours où les églises romanes s’enchâssent comme autant de joyaux. Si l’on préfère la mer, où donc trouver une pareille étendue de côtes, d’un pittoresque si divers, blanches falaises de la Normandie, granits déchiquetés de la Bretagne, plages ensoleillées de la Gascogne, calanques parfumées de la Corse et de la Côte d’Azur ? Et si l’on cherche enfin tout bonnement la campagne ; où donc est-elle plus changeante et plus riante ? Forêts séculaires de l’Ile-de-France, Fontainebleau, Compiègne, Rambouillet ; coteaux plantureux de la Bourgogne : gorges et grottes fantastiques de l’Ardèche et du Tarn ; sol âprement tourmenté du Rouergue, du Limousin, du Quercy ; bords exquis de la Loire, où, dans le jardin de France, les pierres ciselées des châteaux des Valois gardent encore un frisson de volupté élégante et cruelle ; Normandie fraîche et grasse ; Morvan sauvage et sombre, — notre vieux sol gaulois a tous les aspects, tous les charmes, toutes les séductions. L’œuvre de l’homme s’y est, de longue date, ajoutée à la nature. La France a des villes où l’antiquité reste vivante, comme Arles et Nîmes ; elle a des basiliques romanes, comme Caen, Vézelay, Poitiers, Périgueux, Issoire, Le Puy, Toulouse ; elle a ces merveilles de l’art gothique, Rouen, Reims, Amiens, Chartres, Bourges, Beauvais ; ces imposantes ruines féodales de Provins, de Gisors, de Murols et de Coucy.

Notre pays peut, quand il le voudra, retirer du tourisme un produit double ou triple de celui qu’en retire la Suisse. Pour cela, il n’a qu’à suivre, en le perfectionnant encore, le système qui a si bien réussi à nos voisins, qu’à améliorer ses hôtels, ses moyens de communication, toutes les branches, de l’art de voyager.