Pétition des habitans au roi, refus de voter le budget, incidens violens, comme le jet, par un inconnu, d’un liquide corrosif au visage de la statue élevée à la reine Victoria, au milieu d’un enthousiasme général, à l’occasion du jubilé, rien sans doute n’aurait retardé l’application des mesures décidées par M. Chamberlain, si, à l’opposition des indigènes, n’étaient venues se joindre de sérieuses considérations politiques.
La campagne entreprise à Malte par M. Chamberlain contre la langue italienne avait aussitôt provoqué, dans la péninsule, une vive irritation qui se traduisait par des articles très vifs dans la presse patriote. La société « Dante Alighieri, » pour la propagation de l’italien à l’étranger, s’émut de l’ostracisme dont la langue qu’elle se donne la mission de répandre, était l’objet dans un archipel si voisin de la Sicile : elle décida d’y redoubler d’activité et d’y créer de nouveaux sous-comités. En même temps « l’Alliance maltaise, » une association née des troubles et désireuse de marquer à la fois son ressentiment contre M. Chamberlain et ses défiances vis-à-vis de l’Italie, se donnait pour objet de multiplier les relations de toute nature entre Malte et la Tunisie-Algérie et de développer l’enseignement du français dans l’île.
Ces incidens étaient, en eux-mêmes, de peu de gravité ; mais ils survenaient au moment où « le rapprochement franco-italien » pouvait paraître de nature à modifier les conditions de la politique dans la Méditerranée. Est-ce cette considération qui inspira au Cabinet britannique le désir de ne pas froisser le patriotisme italien ? ou bien jugea-t-on à Londres qu’au moment où l’Angleterre avait, par le monde, de si graves difficultés, il ne valait pas la peine, pour le maigre et douteux résultat d’angliciser une petite île, de faire tant de bruit et d’agitation, et de risquer même des complications diplomatiques ? Il est difficile de le dire ; mais, le 29 janvier 1902, M. Chamberlain, répondant à la Chambre des communes à une question de M. Boland, tout en affirmant que l’ordre serait énergiquement maintenu à Malte, annonçait le retrait partiel des mesures qui avaient provoqué toute cette agitation :
Notre conduite, disait le ministre des Colonies, semble avoir été incomprise en Italie, où elle a causé du déplaisir et de l’irritation ; il serait déplorable qu’un malentendu altérât ou diminuât le moins du monde les sympathies qui ont existé et qui, nous l’espérons, existeront longtemps entre l’Angleterre et l’Italie. Quant à la proclamation relative à la substitution de