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à la critique. Dans la plupart des « spécialités, » nous voulons avoir un trop grand nombre de brevetés ; or, là comme ailleurs, la qualité se concilie mal avec la quantité. Prenons, par exemple, les canonniers et les mécaniciens, chargés de la mise en action des engins qui assureront plus particulièrement le succès de nos nouveaux types. Le vaisseau-école la Couronne, dont la tâche serait assez lourde déjà s’il se bornait à former des pointeurs émérites, des chefs de pièce habiles aux démontages d’organes compliqués, des sous-officiers chefs de section ayant des connaissances, du coup d’œil, de l’autorité, emploie du temps et de l’argent à nous fournir par surcroît des canonniers servans que l’on dresserait fort bien à bord de chaque bâtiment armé, — et qu’il faudra bien y dresser, d’ailleurs, quand le service de deux ans limitera aux seuls engagés à long terme le nombre des marins que l’on pourra faire passer utilement par les écoles de spécialités.

Pour les mécaniciens, il en va un peu de même, et l’on ne voit pas bien pourquoi nous dispersons notre effort en donnant une instruction technique étendue à des sujets qui ne rempliront jamais effectivement que le rôle de graisseurs d’organes de machines. Il est vrai qu’en revanche on pourrait, on devrait relever le niveau d’instruction des chauffeurs, catégorie du personnel chargée des appareils les plus délicats et dont le bon fonctionnement importe le plus à la conservation des facultés essentielles du bâtiment.

Et nous devrions aussi avoir des électriciens, introduisant tous les jours à bord un plus grand nombre de machines, d’appareils, de circuits électriques ; et combien compliqués, délicats, fragiles !… Qu’il n’y ait à bord d’une unité de combat où tourelles, treuils de monte-charges, gouvernail sont mus électriquement, où toutes les communications, tout l’éclairage intérieur et extérieur sont électriques, qu’une seule personne, l’officier breveté torpilleur, sur qui l’on puisse se reposer sûrement, c’est une des choses les plus étonnantes d’une organisation où les choses étonnantes ne sont point rares.

Mais enfin ce sont là des détails qui peuvent, encore que fort intéressans, paraître d’une faible importance dans un ensemble dont nous avons lieu d’être satisfaits. Il y a beaucoup plus d’observations et de plus graves à faire sur l’éducation militaire, facteur aussi capital pour la force morale du personnel que la