Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 17.djvu/432

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cotonnières des provinces méridionales de l’Union en ont fourni 10 679 000. On pourrait allonger indéfiniment cette liste de chiffres. À ces richesses naturelles du pays, il faut ajouter l’activité prodigieuse des habitans. Un seul exemple indiquera ce qu’elle vaut : dans les usines du Sud, on désigne la main-d’œuvre qui n’est pas composée de gens de couleur, sous le nom expressif, de « déchets blancs. » C’est sûrement un rebut de population américaine. Cependant, alors qu’en Suisse ou en Allemagne, dans le même genre d’industrie, un ouvrier mène deux machines et en Angleterre trois, ces spécimens décriés du travailleur américain, malgré leur nonchalance méridionale, arrivent à conduire six métiers à la fois[1]. Pour un salaire de 2 fr. 50 à 8 francs par jour, cet ouvrier sudiste donne tout ce qu’il a d’énergie. Il n’a pas de loisir, pas même le goût de lire un journal. Ses idées politiques sont limitées à ses observations personnelles sur les variations de la consommation et de la production. Nous retrouvons l’inspiration que Jefferson avait eue d’exercer la souveraineté sur les eaux du Gulf-Stream, pour y assurer la sécurité du commerce américain, dans les opinions spontanées qu’inspire, aux ouvriers du Sud la connaissance de leurs intérêts. Quand M. Mac-Kinley, le dernier Président, au cours d’un de ses voyages officiels, s’arrêta à Vicksburg, — une petite ville industrielle du Mississipi ; — il vit qu’en son honneur, on avait élevé un arc de triomphe avec des balles de coton. Au-dessus, était écrit « Expansion. » Ce mot que l’on a voulu représenter comme un programme politique, prend son sens véritable quand on le trouve ainsi dans la bouche de producteurs industriels, qui n’épellent même pas l’A B C de la politique.

  1. En 1870, la valeur totale des produits manufacturés en Amérique atteignait 3 385 millions de dollars, soit un excès de 75 pour 100 sur les chiffres de 1860. Dix ans plus tard, en 1880, à un accroissement de population de 30 pour 100 correspond un accroissement de production de 58 pour 100, soit au total 5 349 millions de dollars. En 1890, l’augmentation de la population est de 25 pour 100, celle des produits manufacturés de 69 pour 100, En 1900, à 21 pour 100 d’accroissement dépopulation correspond une augmentation de 54 pour 100, dans les produits manufacturés. Le premier et court chapitre publié par les États-Unis sur leurs échanges commerciaux avec leurs colonies indique l’ascension rapide de la production américaine et l’inévitable nécessité où ils sont réduits par la surproduction de conquérir des marchés extérieurs.
    De 1898 à 1902, soit en quatre ans, les exportations américaines avec Porto-Rico se sont élevées de 1505 946 dollars à 10 719 444 dollars ; avec les îles Hawaï de 5 907155 dollars, à 19 000 000 dollars ; avec les îles Philippines de 127 804 dollars à 5 251 867 dollars.