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Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 17.djvu/483

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d’éclaircir actuellement ces doutes. Au surplus, que la France parle ou qu’elle juge plus à propos de se taire, la Bulgarie aurait certainement tort de croire trouver en elle une aide efficace. Quant à l’Angleterre, « il y a également, dit la note officieuse, des raisons de croire qu’elle donnera son adhésion ; mais on déclare que le gouvernement anglais désire que, quelles que soient les dispositions prises, toutes les puissances les adoptent. » Cela veut-il dire que l’adhésion du gouvernement anglais ne dépend plus que de celle du gouvernement français ? En toute hypothèse, l’unanimité morale de l’Europe parait bien exister : personne n’est disposé à encourager les entreprises de la Bulgarie. S’il en était autrement et si la Bulgarie pouvait à un degré quelconque s’y tromper, il est certain que la guerre éclaterait aussitôt. Nous espérons qu’elle n’éclatera pas. Le prince Ferdinand vient de rentrer à Sofia, après une Aillégiature assez longue dans l’Europe occidentale, et il faut convenir qu’il avait singulièrement choisi son temps pour la faire ! Dans les momens les plus graves, ce prince semble éprouver un besoin irrésistible d’aller se recueillir au loin : il faut souhaiter que cette bizarrerie ne devienne pas chez lui une habitude. Comme il a montré d’ailleurs en diverses circonstances un réel esprit politique, il comprendra sans doute que l’aventure actuelle est pour la Bulgarie sans issue, et que le mieux est d’y mettre fin tout de suite. En agissant ainsi, il rendrait un grand service à son pays, mais celui-ci ne lui en serait peut-être pas aussi reconnaissant qu’il le devrait, car les passions y sont très excitées. Entre les conseils de son bon sens et la recherche de la popularité, que fera le prince Ferdinand ?


François-Joseph est revenu à Pesth et l’a quitté de nouveau sans avoir réussi à dénouer la crise ministérielle, ou plutôt la crise gouvernementale qui pèse sur la Hongrie d’une manière de plus en plus inquiétante. Lorsqu’on songe à la situation de l’Orient et aux obligations qu’elle peut, d’un moment à l’autre, imposer à l’Autriche-Hongrie, on s’étonne de l’obstination que met le parti de l’indépendance à demander une réforme, ou plutôt une révolution militaire, dont la conséquence inévitable serait de diminuer la force de l’armée. Si le parti de l’indépendance est assez mal inspiré pour compromettre les immenses avantages que la Hongrie a retirés du dualisme, et s’il rêve une autre forme politique qui se rapprocherait davantage de l’autonomie, il semble que ce ne soit pas par l’armée qu’il faudrait commencer cette transformation périlleuse, mais que c’est plutôt par elle