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produits, car tout cela, ce sont les facultés, ce sont les fonctions propres de l’intestin. Dès lors, ce qu’il faut se demander c’est pour quelle raison il perd la plus grande partie de ces attributs originels chez les vertébrés, et non point pourquoi il les conserve chez les invertébrés.

La réponse que comporte cette question est fournie par la grande loi qui régit le développement et le progrès des organismes, la loi de la différenciation ou, autrement dit, de la division du travail, différenciation et division toujours plus grandes chez l’être supérieur. Le foie du mollusque ou du crustacé retient toutes ou presque toutes les aptitudes originelles de l’intestin moyen : le foie du vertébré supérieur n’en retient que quelques-unes ; il abandonne les autres. Au pancréas il cède le soin de sécréter les fermens digestifs ; à la muqueuse intestinale l’office d’absorber les alimens digérés ; il se réserve pour lui-même la faculté chimique. Il fait subir à ces produits les transmutations complémentaires de l’absorption.


La multiplicité et la diversité des fonctions hépatiques devient donc immédiatement intelligible si l’on veut bien admettre, comme des vérités démontrées, cet enchaînement de propositions. La première, c’est que le foie n’est autre chose qu’une portion de l’intestin moyen plus ou moins différenciée, conservant, en principe, toutes les aptitudes fonctionnelles de celui-ci. La seconde c’est que ces activités fonctionnelles de l’intestin moyen, que cet organe exerce par lui-même ou dont il délègue une partie à ses annexes, selon les cas, sont au nombre de trois : la fabrication des fermens digestifs pour les diverses catégories d’alimens, l’absorption proprement dite des produits digérés, et, enfin, l’élaboration ou transmutation chimique plus ou moins profonde qui accompagne ordinairement l’absorption.

Or, ces propositions sont, en effet, l’expression de la vérité. En ce qui concerne la première, l’anatomie comparée et l’embryogénie en témoignent d’un commun accord. L’étude du développement montre que le foie n’est en effet, à ses premiers débuts, qu’une dépression de l’intestin. C’est une simple poche, greffée sur le canal digestif ; elle devient étonnamment anfractueuse par suite d’une ramification progressive qui la transforme en cavité glandulaire, et qui nous apparaît comme un artifice de la nature n’ayant d’autre but que de multiplier l’étendue de la surface active. — On suit, pas à pas, cette complication progressive du foie, pendant le développement de l’homme et des vertébrés supérieurs. On voit la paroi de l’intestin moyen se