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Zaleski, Lapicque ; Salkowski, Schmey ont établi l’abondance du fer dans le foie de ces animaux. Dastre a montré, qu’il y était fixé, chez tous, sous la même forme chimique (ferrine). L’interprétation des données analytiques permet d’affirmer que les mutations du fer dans le foie sont, en général, liées à des mutations inverses dans les autres organes et dans le sang. Le métal ne reste pas fixé, immobilisé dans le foie à la façon d’un corps étranger accidentel. Il est continuellement éliminé : chez l’homme, cette élimination est d’environ 30 milligrammes par 24 heures. Elle se fait très faiblement par l’excrétion rénale (1 milligramme), un peu plus activement par la bile (5 milligrammes), très abondamment par l’intestin (24 milligrammes). Elle est excrémentielle. La quantité éliminée chaque jour est remplacée par l’alimentation. Un ensemble de mécanismes physiologiques règle ainsi le mouvement du fer dans l’organisme. Il y a un cycle du fer. Il n’y a pas de cycle des élémens accidentels comme les autres métaux.

C’est surtout l’étude des invertébrés qui a permis de comprendre le rôle général du foie comme régulateur du fer de l’organisme. Les études antérieures sur les vertébrés avaient montré seulement le rôle du foie par rapport au fer du sang. Mais les invertébrés n’ont point de sang rouge et ferrugineux. Et cependant on revoit chez eux les mêmes faits que chez les mammifères, et on les y revoit plus nets, plus clairs, mieux dégagés de toute complication. Ils sont plus significatifs parce que le foie est le seul organe chargé de fer, que le sang, au lieu d’en posséder, ne contient que du cuivre, et que le foie correspondant à ce sang cuivreux n’est pas cuivreux lui-même, mais toujours et exclusivement ferrugineux. Il faut noter enfin que le fer est fixé dans le foie des invertébrés précisément sous la même forme chimique (ferrine) que chez les vertébrés.

Cette universalité du fer hépatique ; l’identité de forme chimique (ferrine) sous laquelle il se présente chez tous les animaux ; son indépendance relative des contingences alimentaires ; son élimination continuelle par la bile et l’intestin et son continuel rétablissement, constituent les faits fondamentaux de la fonction ferrugineuse ou martiale du foie. — Et cette fonction, comme la fonction glycogénique, ou la fonction adipogénique, n’est qu’une manifestation de l’aptitude de transmutation chimique qui est la caractéristique de l’élément hépatique, dont il faut répéter, en finissant, qu’il est le plus actif des ouvriers chimistes de l’économie.


A. DASTRE.