cours : son Histoire du Canton a-t-elle continué de s’imprimer[1], ne fût-ce que lentement ? Il importe qu’il l’achève ; et il y compte, n’est-ce pas ?
« Vous n’irez pas à Genève sans offrir tous mes souvenirs à Mme Hare : vous ne soufflez plus mot du mariage Espérandieu : ne voyez-vous pas sa femme ? Pauvre Mme Clara, je la vois encore montant, avec ses grandes ailes bleues flottantes, Marteray[2], et moi derrière, tout poussif que j’étais alors, forcé de ralentir mon pas très lent pour ne pas devancer le sien et pour jouir à mon aise de cette démarche gracieusement languissante. Est-elle donc sérieusement malade ?
« Ampère est arrivé avant-hier de Rome : grand événement parmi les amis auxquels son entrain si spirituel et si affectueux manquait beaucoup.
« Adieu, chère Madame et amie, baisez pour moi Billon et Billou ; embrassez Olivier et dites à Lèbre toutes mes grâces.
« Bonjour et de tous mes respects et du cœur. »
Samedi.
« Il faut que ceci parte afin d’éviter de nouveau l’imbroglio des lettres croisées. — Qui, moi ? jeter des pierres dans votre lac ? attaquer qui ou quoi que ce soit du côté de Lausanne ? Mais comment m’avez-vous cru capable d’un tel méfait ? Je n’ai jeté quelques petits cailloux que du côté de Neuchâtel, ce qui est bien différent ; j’ai fait ma petite moue à Genève encore ; — mais à Lausanne ! Je suis vaudois et très vaudois ; je croyais faire plaisir à Lausanne même par ces petites pointes contre les antipathies d’à côté. Voilà comme on est injuste. Vous êtes bien sévère, Madame, pour mon français ; mais savez-vous que, sans m’en être douté, j’ai pour moi l’Académie : oui, ouvrez le gros dictionnaire de 1835, tome II, page 91, et mon que triomphe : il restera donc comme une Dent de Mordes sur Aigle. Vous voilà prise, chère prêcheuse. Allons, allons, la grammaire n’est pas notre fait à l’un ni à l’autre : aussi Mme Jacquet[3] a-t-elle plus raison : estre la colonelle ? Vous voilà à Genève, près de votre
- ↑ Juste Olivier n’acheva cet ouvrage qu’en 1842.
- ↑ Rue très montante de Lausanne.
- ↑ Femme du conseiller d’État qui, le 1er novembre 1837, présida la cérémonie de l’installation de Vinet et de Sainte-Beuve comme professeurs à l’Académie de Lausanne, car, chose remarquable, ils furent installés le même jour.