Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 18.djvu/790

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Girardin m’ont défendu[1]. Je vois par votre lettre que M. Guizot avait intéressé plusieurs personnes à ma cause :


...Si Pergama dexlrâ
Defendi possent...


A votre retour, je vous demanderai des éclaircissemens sur certains doutes. Quelques mots échappés me font croire que votre conjecture est vraie[2].

Remanierai-je mon mémoire ? J’ai causé avec plusieurs de mes adversaires, et, si je les entends bien, il faudrait supprimer tout ce qui vaut la peine d’être conservé. Suis-je même assez flexible pour réussir dans cette voie ? Autrefois, je l’aurais pu ; j’eus une fois un prix de version parce que, pour plaire au professeur, j’étais parvenu à mettre trois sens dans chaque phrase de la traduction.


Je me laissais conduire à cet aimable guide.


Cet heureux temps n’est plus. D’ailleurs, j’aurais peur de choquer l’un en contentant l’autre. Tel juge m’a dit que ma première page sur Montesquieu était excellente, tel autre qu’elle était ridicule. Mes philosophes d’Allemagne enseignent bien la doctrine de la conciliation des contraires. Je ne sais si je serai capable de l’appliquer.

Vous êtes bien l’homme selon mon cœur avec vos grandes lettres. Et sur Beyle encore ! Vous me gâtez et j’ai peur de vous répondre ; je vous répondrais trop.

Là-dessus je suis comme Nestor, je parlerais un an, ou même deux ans de suite, en vous lassant sans me lasser. Permettez-moi seulement de répondre à votre principal reproche. Il ne sera

  1. Lettre de M. Villemain à M. Guizot : « Mon cher ami, vos armes ne sont heureuses que dans vos mains. Nous avons été battus sur le prix Tite-Live, après une longue séance où j’ai dit de mon mieux de bonnes raisons, et où M. Vitet, qui avait lu l’ouvrage, a parfaitement discuté. Du reste, en regrettant ce résultat, je crois, comme on l’a dit éloquemment de tous côtés, que c’est pour le bien de l’auteur, dont l’ouvrage, facilement amélioré, sera couronné l’an prochain... »
  2. Lettre de M. Guillaume Guizot, du 5 juin 1854 : « Je soupçonne qu’il pourrait bien y avoir quelque ingrédient venu du Ministère de l’Instruction publique, dans la pilule amère que certains cherchent à vous administrer. Le nommé Fortoul, n’ayant pas été nommé l’autre semaine (à l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres), doit avoir de la rancune contre le parti libéral de l’Institut, contre mon père entre autres ; et comme il vous connaît d’autre part (voir Correspondance, t. Ier, p. 230), il aura peut-être engagé ses amis à le venger sur votre dos de sa propre défaite. »