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souvent l'Empereur en prend directement le commandement. C’est un de ses sports favoris.

C’est ainsi que, le 11 septembre 1902, il s’est mis à la tête d’un corps de cavalerie de deux divisions, avec lequel il a débouché par le sud de Tempel et à 1500 mètres à l’Ouest de ce village, pour charger la 41e division d’infanterie dans toutes les directions.

Le prince Albrecht, chef des arbitres, a déclaré que la division eût été taillée en pièces.

Le lendemain, le corps de cavalerie, toujours sous les ordres de l’Empereur, fait un grand circuit à l’Est et débouche sur le champ de bataille, par derrière. C’est la manœuvre de Condé à Rocroi. Les régimens se forment à mesure qu’ils arrivent et, dès qu’ils sont prêts, l’Empereur les lance à la charge dans différentes directions. Comme la veille, l’arbitre décide que tout a été sabré ou pris. Il n’est pas fait de combat à pied. Il semble que, si l’infanterie a changé sa tactique du tout au tout, la cavalerie est revenue à celle de Seydlitz à Künersdorff, le 12 août 1759.

Quoique, ce jour-là, elle n’ait eu affaire qu’à de mauvais fusils à pierre, on sait qu’elle y fut presque détruite et que son sacrifice ne put pas sauver l’armée prussienne de la déroute.

Mais des idées nouvelles paraissent se faire jour.

Dans un article du Militär Wochenblatt, le 8 décembre dernier, le général de Pelet-Narbonne écrivait : « Dans les grandes attaques de cavalerie de la fin des batailles de manœuvres, qui reproduisent « l’événement napoléonien, » ne se trouverait-il pas des cas où il serait avantageux de faire coopérer à l’action de la cavalerie celle de tirailleurs armés de la carabine et jetés, par exemple, aux défilés situés sur la ligne de retraite de l’adversaire ? Il faudrait s’ingénier pour que la cavalerie, lorsque l’attaque à l'arme blanche est impossible, trouvât le moyen d’apprendre à se rendre utile, même dans le combat. »

Ce qui précède ne donnerait pas des renseignemens suffisans sur l’orientation des idées en Allemagne, si la question n’avait pas été très clairement élucidée par le général allemand von der Goltz, l’auteur du livre sensationnel : la Nation armée.

Dans une remarquable étude, publiée à Londres par la National Review, dans son numéro de novembre 1903, le général établit d’abord que, au point de vue stratégique, les événemens de la guerre sud-africaine ne font que confirmer l’exactitude des anciens préceptes et des vieux principes.