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Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 20.djvu/187

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déplacement de 288 000 tonnes et des travaux de construction répartis sur cinq années.

L’exécution du programme se poursuivit régulièrement. Elle devait être achevée à la fin de l’exercice fiscal 1893. Les patriotes de la Ligue n’attendirent pas ce terme pour renouveler l’agitation en faveur d’une marine plus forte. En effet si, d’après les publications officielles, la marine anglaise, en 1892, comptait 126 vaisseaux de guerre en service actif au dehors ou dans les ports, et une réserve de 149 autres navires, destinée à renforcer ou à remplacer les escadres de première ligne, la vérité était qu’un très petit nombre des bâti mens de réserve auraient pu être prêts à court délai, et que l’amirauté disposait encore de fort peu d’unités modernes pour remplacer les bâtimens démodés et sans valeur militaire qui portaient le pavillon en haute mer.

Lord Charles Beresford lança, dès le mois de mars 1893, un nouveau programme, tendant à porter la puissance de la marine à un niveau tel, qu’elle ne fût pas seulement en état de tenir tête aux forces de deux autres puissances navales réunies, mais qu’elle fût assurée de les détruire. Le résultat ne pouvait être atteint que si la force matérielle de la marine anglaise était en réalité d’un tiers plus élevée que celle des deux autres, puissances réunies. Or, la France et la Russie avaient en service ou en construction 45 cuirassés (France 30, Russie 15). Il en fallait 60 à l’Angleterre, qui n’en avait encore que 42. La France et la Russie possédant 90 croiseurs, l’Angleterre en devait avoir 120 à 130. Il lui manquait encore 10 croiseurs à grande vitesse pour la protection de la marine marchande. La Russie et la France possédaient près de 400 torpilleurs. L’Angleterre en avait moins de 100. Il fallait construire 10 cuirassés d’un tonnage modique et d’un faible tirant d’eau, mais assez puissamment armés pour être en état de détruire les stations de torpilleurs de l’ennemi dans les mers étroites. Cet ensemble de constructions neuves représentait une dépense de £ 23 millions (580 millions de francs), y compris les frais de construction de nouvelles jetées à Gibraltar. Le programme devait être exécuté en un peu moins de quatre années.

Au moment où le marin zélé, mais un peu turbulent, qu’était lord Charles Beresford, élaborait ce plan d’augmentation des forces navales, les péripéties de la politique intérieure avaient ramené depuis quelques mois (juillet 1892) M. Gladstone et les libéraux au gouvernement. Le vieux lutteur avait l’esprit occupé