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Sait-il que, sans l’appui robuste de ses bras,
Crouleraient les cités comme des choses vaines,
Et que ses os, ses nerfs, ses muscles et ses veines
Sont la vie et le pain de ses frères ingrats ?

Sait-il que, sans le coutre agreste qui féconde
Le guéret séculaire où frissonnent les blés,
Les peuples pâliraient, soudainement troublés,
Et, de stupeur saisi, chancellerait le monde ?

Peut-être. Mais le vieux laboureur ne veut pas,
Lui qu’un rayon suprême en mourant illumine,
Qu’à nos yeux effarés se dresse la famine,
Et c’est pourquoi d’aïeux obscurs il suit les pas.

Et, bien qu’auréolé d’apothéose astrale
Il vibre avec ses bœufs dans une gloire d’or,
Ce paysan courbé semble porter encor
L’héroïque fardeau de la glèbe ancestrale.

LEONCE DEPONT.