Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 20.djvu/602

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prendre. Je vous envoie ci-joint une espèce d’élégie en prose qui m’a été inspirée par cet événement[1].

On a beaucoup parlé d’amnistie, mais je doute très fort qu’elle ait lieu. Je voudrais savoir à quoi m’en tenir, avant de commencer plusieurs travaux que j’ai en vue.

Je ne me laisse pas abattre par la mauvaise fortune, parce que ma conscience me console et me fait espérer. Je plains ceux-là, quelque élevés qu’ils soient, qui ne sentent pas dans leur cœur la justification de leur passé et la prédiction de leur avenir. »


Le prince, pour se distraire, entreprend à la fois toutes sortes de travaux. Le 16 juin 1841, il écrit à Dufour :


« J’ai donné l’ordre à Paris qu’on vous envoie un exemplaire d’une brochure que j’ai publiée dernièrement ; j’espère qu’elle vous fera plaisir. Aujourd’hui, je vous envoie les notes que j’ai rédigées cet hiver sur mon invention pour amorcer les fusils à percussion. Vous voyez que je ne perds pas mon temps et que je sais mettre à profit ma captivité !

Maintenant, j’ai formé le grand projet d’écrire l’histoire de Charlemagne. Dans ce but, il faut que je rassemble beaucoup de matériaux. Ayez la bonté de remettre la lettre ci-jointe à M. de Sismondi, auquel je m’adresse afin qu’il m’indique les ouvrages que je dois me procurer…

Je ne me plains nullement de mon sort, parce que je trouve qu’ici je suis à ma place. Il n’y a rien de plus terrible dans la vie que d’avoir toujours une fausse position.

Conneau, qui se rappelle à votre souvenir, passe son temps… à élever des rossignols ! »


Le 25 août de la même année, le grand Empereur d’Occident est toujours l’objet de ses préoccupations et on peut voir que l’histoire qu’il projetait eût été faite surtout au point de vue militaire.


« J’ai commencé, dit-il, à lire plusieurs ouvrages relatifs à Charlemagne ; mais, ayant égaré votre lettre, j’ai oublié le nom de l’auteur du poème sur la bataille de Roncevaux ; ayez la

  1. Cette pièce, à laquelle Napoléon III attribuait une certaine valeur, puisqu’il l’a recueillie dans l’édition de ses Œuvres, en 1854, est intitulée : Aux mânes de l’Empereur. En voici le début : « Sire, vous revenez dans votre capitale et le peuple en foule salue votre retour : mais moi, du fond de mon cachot, je ne puis apercevoir qu’un rayon du soleil qui éclaire vos funérailles. »