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Wellington et sir Robert Peel, et après avoir été un des adversaires les plus décidés de la réforme électorale, il s’illustre en l’opérant. Sans doute, il est désirable, dans l’intérêt de la moralité des partis et des hommes, que chacun grandisse et tombe avec son parti ; mais il est des circonstances dans lesquelles un gouvernement agit avec sagesse lorsqu’il imite le gouvernement anglais. Une réforme longtemps débattue ne peut se réaliser souvent que par un compromis entre ceux qui la défendaient et ceux qui l’attaquaient. Or, à qui confier le soin de ce compromis, si ce n’est à ceux qui étaient les plus forts et les plus nombreux ? Si l’on s’adressait aux membres de la minorité, le parti de la résistance se tiendrait à l’écart et tout avorterait. Lorsque, au contraire, les chefs d’une majorité pensent que l’intérêt du pays leur commande de revenir sur leurs refus précédents, la minorité qui demandait le progrès s’unit à ceux qui le repoussaient, et la réforme se réalise sans difficulté. (Mouvemens divers.) C’est ce qu’on a eu raison de faire le 19 janvier. Mais les ministres qui avaient accepté ce mandat contractaient l’obligation impérieuse de réaliser le programme qu’ils avaient eu le malheur de combattre avec plus de netteté, d’énergie, d’ampleur, que n’eussent pu le faire ceux-là mêmes dont il était l’œuvre. Cette condition n’a pas été remplie. Le programme a été mollement exécuté, mal exécuté dans toutes ses parties. (Rumeurs.)

« Cette conduite explique comment une réforme, qui aurait dû être envisagée de toutes parts comme un événement heureux, est au contraire, de très bonne foi, considérée par un grand nombre comme un événement douteux. Sans doute, le pays est calme matériellement, et rien, même de loin, ne peut faire craindre que ce calme soit troublé. Mais ce qui est à redouter pour un gouvernement, fort comme celui-ci, ce qu’il y a à craindre et à prévenir, c’est la difficulté de gouverner qui résulterait de l’absence d’un concours empressé et constant. (Rumeurs.) Ce qu’il y a à craindre, à prévenir, c’est que les populations, en restant soumises, deviennent malveillantes… (Vive interruption, et qu’en restant décidées à ne pas renverser, elles retirent leur assistance et se bornent à observer sans coopérer. Certainement, nous n’en sommes point encore là (Ah ! ah !) ; mais, si vous n’y prenez garde, si vous accomplissez toujours vos actes les plus louables de façon qu’il reste quelque doute sur leur signification, nous y viendrons. (Non ! non !) Et alors la situation sera grave. »