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Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 21.djvu/688

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Le projet a été étudié au point où la largeur du détroit est de 33 450 mètres ; mais, le pont sous-marin ne devant commencer sur chaque rive que sur des fonds de 15 mètres à mer basse, les deux têtes de l’ouvrage seraient constituées par deux jetées en maçonnerie s’avançant jusqu’à cette profondeur. Ces deux jetées laisseraient donc entre leurs musoirs une distance d’environ 31 kilomètres. Telle serait en réalité la longueur effective du pont, qui comporterait par conséquent 516 travées.

Quant au chariot roulant, il se composerait d’une plate-forme établie à 4 ou 5 mètres au-dessus des plus hautes mers, supportée par une charpente métallique formée de poutres longitudinales et transversales. Cette plate-forme aurait 200 mètres de longueur sur 16 mètres de largeur, et serait munie de 4 voies de chemin de fer parallèles, pouvant recevoir chacune un train complet de 20 à 24 wagons avec sa locomotive. Elle serait surmontée vers ses deux extrémités par deux spardeks ou ponts supérieurs, formant des terrasses surélevées pour l’agrément des voyageurs qui ne seraient pas contraints de rester dans leurs wagons. Ce chariot, pesant à vide 4 000 tonnes, serait actionné par un moteur quelconque, très probablement une série d’accumulateurs électriques, et sa mise en marche ne paraît devoir donner aucune incertitude. Enfin, les rails du chariot seraient exactement raccordés, au départ et à l’arrivée, avec les rails des voies ferrées de terre, de sorte que les trains continueraient leur marche sans arrêt et sans transbordement.

C’est, on le voit, l’amplification, sur une très vaste échelle, du petit chariot qui sert au transport des piétons entre Saint-Malo et Saint-Servan. Ce projet semble présenter au premier abord de réels avantages : économie, grande simplicité et rapidité d’exécution, sécurité absolue de l’exploitation. Il pourrait, espère-t-on, être mené à bonne fin dans cinq ou six années, et l’on pense que sa dépense ne s’élèverait pas à plus de 350 millions. C’est à peu près le tiers du temps et de la dépense que paraissent exiger les projets antérieurs. A tout prendre, il serait, à la rigueur, permis de le considérer comme une solution d’attente ou provisoire qui faciliterait même la construction ultérieure d’un grand pont sur la Manche, puisque le bac roulant pourrait fonctionner alors comme un incomparable pont de service, transportant les matériaux et les ouvriers, excellente base d’opération, qui permettrait de multiplier les chantiers au milieu du détroit. Mais rien ne