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moderne ; il faut avoir la certitude que les voyageurs et les marchandises viendront y affluer. C’est ce qui manque déjà un peu à quelques-uns ; et malheureusement la concurrence étrangère tend à nous enlever de plus en plus notre clientèle. C’est très bien d’avoir d’excellens outils ; mais il est indispensable que ces outils travaillent, et surtout qu’on leur fournisse régulièrement les matières premières qui doivent les alimenter. Nous l’avons déjà dit ailleurs. Depuis vingt ans, Italiens et Germains se donnent très facilement la main à travers et par-dessous les Alpes, nous laissant ainsi bien souvent à l’écart ; et, si on n’y prend garde, la France, comme l’Espagne, cet autre pays délaissé depuis plusieurs siècles, finira par se trouver en dehors du grand courant commercial qui traverse l’Europe du Nord au Midi.

La suppression complète du transbordement entre le continent et le grand archipel britannique serait de nature à maintenir en France une partie du transit de l’Angleterre avec l’Ouest et la plus grande partie de l’Europe. Elle ranimerait un peu le grand courant de Calais à Marseille, qui tend à s’affaiblir d’une manière très regrettable. La réalisation d’un projet de communication directe et continue à travers le Pas de Calais, plusieurs fois sur le point d’aboutir, est donc au plus haut degré une question d’intérêt et d’avenir national. Après les manifestations brillantes de l’Exposition universelle, qui ne sauraient se renouveler de sitôt, ce pourrait, ce devrait être l’œuvre sérieuse des premières années du siècle dans lequel nous avons fait déjà les premiers pas.


CHARLES LENTHERIC.