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degrés, il n’eut, en effet, qu’à mettre à profit l’invention faite en 1860, par les frères Siemens, des fours à récupération de chaleur, fours à l’intérieur desquels il est facile de maintenir une température uniforme de 1 600 degrés environ.

Mais il fallait encore que la régression fût avantageuse. Or, par l’emploi d’appareils de dimensions convenables, il est aisé d’opérer sur des charges de fonte de 20 à 30 tonnes (on va même aujourd’hui jusqu’à 100) ; de plus, l’usage des fontes réactives de Mushet et de la méthode acide ou basique ne comporte aucune difficulté ; le brassage, sans être automatique, comme dans le Bessemer, est facile, puisque la masse traitée est parfaitement fluidifiée ; enfin, remarquons-le bien, l’affinage étant toujours de longue durée (de 7 à 8 heures), on peut, à chaque instant, constater l’état du bain et modifier sa composition suivant les besoins. Le procédé Martin devait donc permettre et a permis, en effet, ce que ne permet pas le Bessemer : la fabrication en grande masse, et à volonté, avec le même appareil d’affinage, d’aciers de compositions variées et parfaitement déterminées.

D’ailleurs, le Martin ne l’emporte pas seulement sur le Bessemer par la variété et par la supériorité de ses produits. Aujourd’hui, grâce à ses perfectionnemens successifs, grâce à l’emploi de véritables fours à fabrication continue où l’on affine plus de 200 tonnes de fonte par 24 heures, il tend à l’égaler comme puissance de production. Enfin, si, à première vue, l’affinage par le procédé Martin semble devoir être beaucoup plus coûteux que par le procédé Bessemer, en réalité la différence n’est pas énorme : les frais d’affinage d’une tonne de fonte, de 20 francs environ par le procédé Bessemer, ne dépassent pas en effet 30 francs lorsqu’on use du procédé Martin, ce qui tient à ce que le Martin n’a pas de soufflerie, consomme relativement peu de combustible et n’exige aucun effort spécial à la main-d’œuvre humaine.

Aussi se demande-t-on souvent, « si, un jour, le Martin n’assistera pas aux funérailles du Bessemer, comme celui-ci à celles des fours à puddler ? »

Il est malaisé de répondre à une pareille question. Cependant, remarquons d’abord que les fours à puddler ne sont pas encore morts : à tort ou à raison, quoique les Bessemer et les Martin fournissent, comme nous l’avons dit, de véritables fers commerciaux (aciers extra-doux), on fabrique, à l’heure actuelle, presque