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Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 21.djvu/895

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pas absolument avant cette date de 1830 ; et, par exemple, dès 1769, à la suite de l’invalidation répétée du journaliste et pamphlétaire Wilkes, s’était constituée la Société pour soutenir le bill des droits, qui était bien, par son objet même, une association politique. On ne cherchait guère à le dissimuler : « La conjoncture sembla favorable, écrit dans ses Mémoires l’un des principaux promoteurs de la Société, Horne Tooke, pour organiser un genre d’opposition aussi nouveau que redoutable et pour concentrer, au moyen d’associations politiques, les mécontentemens jusqu’alors méprisés et l’influence d’un nombre d’individus, isolés en une masse formidable qui, sans être chargée des formes et des entraves d’un corps politique, produirait toute l’ardeur, le zèle et l’effet d’une grande collectivité[1]. » Mais, quoique, dans l’intervalle, on eût vu naître, avec une autre association, la Constitutional Society, démembrée de la première. des comités de correspondance, fondés, à l’imitation des colonies américaines, pour provoquer et présenter des pétitions ; quoique, dans presque tous les villages, vers la fin de la guerre contre Napoléon, l’on eût vu pulluler des Hampden clubs, des Spenceans clubs, indices plus ou moins frappans d’une organisation plus ou moins secrète, ce n’est pourtant qu’en 1830, à Birmingham, que fut scellée l’Union politique entre les classes inférieures et moyennes du peuple, dans le dessein de favoriser « le déploiement pacifique d’un immense pouvoir moral organisé, qui ne pourrait pas être dédaigné ou méconnu. »

Bientôt les villes les plus considérables du royaume tinrent à honneur de copier Birmingham, et l’Union politique essaima en un grand nombre de filiales, qui, à leur tour, se réunirent en une fédération, l’Union politique nationale, avec un « Conseil politique, » siégeant à Londres. Le gouvernement sentit le danger, et qu’il y avait là un symptôme et une menace de déplacement, de glissement du pouvoir : une proclamation royale du 22 novembre 1831 déclara « illégales et anticonstitutionnelles les associations politiques composées de branches distinctes, avec des divisions et subdivisions, sous des chefs de rang et d’autorité gradués, et soumises à la direction d’un comité et d’un conseil supérieurs. » Sous le coup, les Unions se terrèrent, mais n’en poursuivirent pas moins, parallèlement et sans

  1. Ostrogorski, I, p. 109.