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chronométrie spéciale qui ne saurait s’accommoder de nos unités ordinaires.

En poursuivant dans cette voie, on constate même que ces altérations sont mutuellement associées de façon à réaliser des cycles de transformations, dont l’analogie avec les phénomènes caractérisant la physiologie proprement dite ne peut manquer de nous frapper beaucoup.

Voilà qui mérite évidemment de nous arrêter un moment.

Un premier exemple, lié aux faits précédemment rappelés, concerne les rapports réciproques des générations successives de terrains. Nous avons dit qu’il s’est fait de tous temps des formations correspondantes à celles d’aujourd’hui : la mer déposant des galets, des sables et des limons, qui se sont distribués les uns par rapport aux autres dans les mêmes situations relatives. Mais ces terrains stratifiés ont toujours été édifiés avec de la matière empruntée à des roches plus anciennes, et c’est la même substance en somme qui a pris place dans l’économie des couches successives : ce qui rappelle la communauté de matière entre les générations organisées qui se sont remplacées les unes les autres.

Il y a même plus : par suite d’une disposition dont l’explication nous échappe, certaines matières de première nécessité pour les manifestations biologiques, la chaux par exemple, sont en proportion relativement très faible et chaque époque est contrainte de l’aller glaner au sein des roches antérieures qui, peu à peu, et en raison même de leur âge, en sont appauvries, puis privées tout à fait. L’agent de cette circulation, c’est l’eau pourvue d’une proportion convenable d’acide carbonique. Elle s’infiltre dans le sol, y dissout çà et là les particules calcaires et les ramène au jour, soit dans les régions exondées où des travertins sont édifiés, parfois avec le volume de collines entières, soit dans la mer où les animaux de tous genres arrêtent au passage la précieuse matière, pour l’incorporer dans leur squelette, dans leur coquille ou dans leur carapace. Et comme cette dissection des roches peut se continuer indéfiniment, que les vieilles assises l’ont éprouvée parfois pendant des périodes entières, les sédimens des premiers âges sont peu à peu décalcifiés et on voit, en certains pays comme le Canada ou le pays de Galles, les formations paléozoïques presque entièrement réduites à des schistes et à des grès.