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les 500. Tous aussi sont situés dans le département du Nord, et plus particulièrement au pays de la belle toile, aux alentours de Lille, à Armentières ou dans la banlieue d’Armentières. Deux font la filature du lin ; une en fait à la fois la filature et le tissage ; une fait, la filature du jute ; deux la filature du coton.


Etablissemens A et B. — Filature de lin.

Avant toute observation et toute description, une remarque est nécessaire. La culture et la préparation du lin ont subi, depuis l’avènement de la grande industrie et la multiplication des moyens de transport, des modifications qui ne sont pas loin d’équivaloir à une transformation radicale.

De la culture nous ne dirons qu’un mot, pour ne pas sortir de notre sujet. Elle couvrait autrefois en France une surface bien plus étendue : dans les pays liniers, chaque fermier avait son lot, qui variait avec la grandeur de la ferme. Comme cette culture exige une terre bien préparée et bien nette, elle demandait des sarclages nombreux et soignés, qui procuraient à beaucoup de femmes et de jeunes filles un salaire qu’elles auraient pu difficilement tirer d’ailleurs. La récolte, mûre en juillet, ouvrait en quelque sorte la série, qui continuait par le seigle, le blé, etc., sans que, par conséquent, il y eût double emploi ou manque à gagner d’un côté ce que l’on gagnait de l’autre. La concurrence des lins de Russie, leur bon marché fréquent, ont porté à la culture du lin français un coup assez rude pour aller- presque jusqu’à la tuer.

La préparation s’en est elle-même ressentie. On sait en quoi consiste cette préparation. Le lin, aussitôt arraché, est séché sur place, mis en chaîne, c’est-à-dire en petits tas, et, dès que la dessiccation est suffisante, rentré, égrené, puis soumis au « rouissage » et au « teillage. » En cela encore, le progrès s’est affirmé par des effets qui n’ont pas d’abord été tous bienfaisans. Tant que l’usage des machines agricoles ne s’était point généralisé, les fermiers étaient obligés de garder pendant l’hiver quelques ouvriers. Les travaux de la ferme ne prenant pas tout leur temps, ces quelques ouvriers rouissaient le lin et le teillaient à petites journées. Certes, ils le faisaient dans des conditions d’hygiène déplorables, et il suffit de le constater pour regretter moins qu’il n’en soit plus ainsi. Mais alors, dans ce milieu simple et pauvre,