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LA GRANDE MADEMOISELLE

IV[1]
VERS L’AMOUR


I

Ce n’était point par compassion, ni davantage par amitié, que Louis XIV avait rappelé d’exil, une seconde fois, sa cousine de Montpensier, Il avait renoncé à lui faire épouser Alphonse VI, puisqu’elle s’opiniâtrait dans son refus, mais il suivait son idée de la marier « où il serait utile pour son service, » et il avait besoin de l’entretenir d’un autre projet. Pendant qu’elle était en pénitence à Eu, l’une de ses petites sœurs, Mlle de Valois, avait épousé le duc de Savoie, Charles-Emmanuel II, et était morte (14 janvier 1664) au bout de quelques mois de mariage. Les veuvages de princes étaient rarement longs. Le Roi avait arrangé tout de suite d’offrir les millions de la Grande Mademoiselle au duc de Savoie, qu’il importait de rattacher à la France, et de dédommager le roi de Portugal en lui donnant l’une des princesses de Nemours[2]. La nouvelle combinaison était connue du monde politique On lit dans le Journal d’Olivier d’Ormesson, à la date du 4 juin 1664 : « M. Le Pelletier[3]me dit encore

  1. Voyez la Revue du 1er mars 1904.
  2. Mlles de Nemours étaient filles d’Elisabeth de Vendôme, sœur du duc de Beaufort, et d’Henri de Savoie, duc de Nemours, qui fut tué en duel par son beau-frère (30 juillet 1652). La cadette épousa Alphonse VI le 28 juin 1666.
  3. Claude Le Pelletier, alors président aux enquêtes. Il fut depuis ministre d’État et contrôleur général des finances.