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à peine, d’existence, sur la proposition de privilèges exorbitans à accorder aux ouvriers syndiqués, question qui était sa seule raison d’être. Rien n’est plus conforme à l’esprit du socialisme ouvrier que cet égoïsme syndical, qui sacrifie le peuple des travailleurs aux intérêts d’une minorité tyrannique.


II

Nous venons d’essayer de nous rendre compte, trop sommairement, de ce que représente un Congrès tel que celui d’Amsterdam : à côté du nombre, il faudrait pouvoir déterminer le caractère, la valeur des individus. Le programme des questions soumises au Congrès par les organisations socialistes des divers pays était, comme toujours, trop chargé. Il comprenait la législation ouvrière, la politique générale, la tactique socialiste, à l’exclusion des questions agraires qui ne sont jamais abordées, et pour cause : les socialistes Allemands, qui ont tenté de les discuter jadis à Breslau, se sont heurtés à la difficulté inextricable de concilier l’agrarisme et le collectivisme. Les ouvriers des champs commencent cependant à se syndiquer et à faire grève ; dans certaines contrées, ils votent en faveur des candidats socialistes. Les guesdistes se montraient très fiers d’un rural, objet rare, qu’ils avaient amené au Congrès. M. Jaurès a présenté une adresse de paysans languedociens.

La plupart des sujets traités, quand les personnes ne sont pas en jeu, sont expédiés d’une façon indifférente et superficielle le plus souvent, ou ne sont même pas discutés. Les socialistes émettent des revendications ou des vœux, sans se donner la peine d’indiquer les moyens pratiques de les réaliser. Ou encore, ils protestent contre tout ce qui blesse leurs sentimens socialistes. Molkenbuhr, député au Reichstag, s’est fait une spécialité de la politique sociale et de l’assurance ouvrière. Il veut bien reconnaître que les grandes lois d’assurances ouvrières ont donné quelques satisfactions aux ouvriers allemands. Mais les accidens deviennent de plus en plus nombreux dans l’industrie, et cela tient uniquement à ce que l’excès de travail fatigue l’attention. L’assurance contre les accidens doit donc avoir pour complément la diminution des heures de travail. L’assurance contre le chômage résulte du droit à l’existence. Il faut donc l’organiser. Les capitalistes, chargés du poids de cette assurance,