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Celle de Mac Mahon ne l’était pas encore. Comme on l’engageait à évacuer Malakoff, que l’on croyait miné :

J’y suis, j’y reste ! répondit-il simplement, et il y resta ; ce ne fut pas sans peine !

Les réserves russes accouraient des casernes et du faubourg pour reprendre la redoute. Un combat furieux s’engagea à la gorge, dirigé par ces généraux russes qui, depuis si longtemps, rivalisaient avec les nôtres de vaillance chevaleresque, Khrouleff. Youférof, Lyssenko ; tous trois y furent blessés. Leurs admirables soldats n’opérèrent leur retraite à une heure et demie que pour attendre du renfort derrière les retranchemens intérieurs.

Il en était venu aux Français : la brigade Vinoy, de la 1re division ; la brigade Wimpfen, de la division Camou, deux bataillons de voltigeurs de la Garde, un de grenadiers. Mac Mahon attendait le retour offensif des Russes en réparant les brèches de la redoute, en consolidant la gorge et en répartissant les bons tireurs aux abords de l’enceinte circulaire.

A deux heures et demie, deux fortes colonnes russes, sous le commandement du lieutenant général de Martinau, marchaient, à la fois, sur la gorge de Malakoff et la batterie Gervais, qu’un bataillon, parti du Grand Redan, essayait de prendre à revers.

Mais les tirailleurs postés aux abords des ouvrages conquis firent subir aux Russes des pertes énormes. Après une tentative désespérée contre la gorge solidement remparée, Martinau eut le bras emporté par un boulet. Ses colonnes opérèrent leur retraite vers la ville, poursuivies par le feu meurtrier des canons du Mamelon Vert.

Ce qui restait des cinquante braves enfermés dans le réduit casemate de Malakoff consentit alors à mettre bas les armes ; il était trois heures et demie.

La bataille était finie. Elle avait coûté 7 551 hommes aux Français, 2 447 aux Anglais, et 12 000 aux Russes.

Vainqueurs et vaincus avaient la même part de gloire !


GÉNÉRAL HARDY DE PÉRINI.