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par l’épingle ou le bouton est transmise par les nerfs jusqu’aux centres psychiques inférieurs. Or, cet acte de se coiffer ou de se boutonner est un acte habituel, automatique ; le polygone suffit à l’exécuter. L’intervention de O n’est nullement nécessaire. Donc, il n’est pas nécessaire que les impressions directrices de ces actes arrivent jusqu’à O et soient perçues. Il suffit qu’elles arrivent aux centres psychiques inférieurs et qu’elles y provoquent l’acte automatique désiré.

Dans le polygone se fait aussi une synthèse primaire des sensations ou plutôt des impressions extérieures et, chose curieuse, le résultat de cette synthèse polygonale peut être perçu par O, alors que ce même centre supérieur ne perçoit pas certains des élémens composans de cette synthèse.

Ainsi, il y a des hystériques qui ne voient pas certaines couleurs : le rouge et le bleu par exemple. Quand, devant ces malades, on fait tourner le disque de Newton sur lequel toutes les couleurs de l’arc-en-ciel donnent par la rotation une sensation de blanc, l’hystérique devrait voir une couleur résultant de la superposition des seules couleurs qu’elle voit ; elle ne devrait pas voir blanc, puisque le blanc nécessite pour sa production ce rouge et ce bleu qu’elle ne voit pas. En réalité, elle voit blanc comme ceux qui distinguent toutes les couleurs. Donc, l’impression rouge et bleue n’arrive pas chez elle jusqu’à la conscience en O, mais elle arrive jusqu’au polygone où se fait la synthèse des couleurs en rotation et, comme le résultat de cette synthèse est le blanc, O le perçoit.

La même explication s’applique à des phénomènes bien paradoxaux en apparence que présentent certains de ces sujets qui ont perdu la vue dans une partie de leur rétine. On dit à un sujet de ce genre : « Vous vous endormirez dès que vous verrez cette clef. » On fait arriver la clef dans la partie du champ visuel pour laquelle le sujet est aveugle ; il ne voit pas la clef, mais il s’endort ; l’impression de la clef est arrivée jusqu’à son polygone et a déterminé l’hypnose.

Avec certaines hystériques l’expérience suivante réussit souvent. Le sujet ne sentant pas d’un côté du corps, on lui fait fermer les yeux et on lui dit : « Je vais vous piquer tantôt d’un côté, tantôt de l’autre ; quand vous sentirez, vous direz oui, et quand vous ne sentirez pas, vous direz non. » Et bravement il dit non (au moins les premières fois) quand on le pique dans