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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 26.djvu/478

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comités du parti radical-socialiste plus que les autres. M. Jaurès avait déplacé la question ; M. Sembat l’a si fort rapetissée, qu’il n’en est plus rien resté du tout. « Je demande à M. le président du Conseil, a-t-il dit sur le mode le plus solennel, de répondre simplement à cette question : au lendemain de ce débat, les préfets devront-ils comprendre qu’ils doivent cesser toute relation avec les groupemens républicains, et lorsqu’un citoyen se présentera à la préfecture au nom d’un de ces groupemens, sera-t-il reçu avec les égards dus aux républicains ? » On devine la réponse de M. Rouvier.

Cette courte discussion, sans parler des actes qui l’avaient précédée, créait à la Chambre une atmosphère nouvelle qui n’était plus celle où M. Combes aimait à respirer. Ses amis s’en sont émus : probablement il s’en est ému lui-même. Il a pris goût à l’action ; on ne voit que lui dans les couloirs de la Chambre ; il tend des pièges à ses successeurs ; il est impatient de les remplacer. Un souvenir, qui est d’hier, revient à la mémoire. On se rappelle la colère de M. Combes contre M. Waldeck-Rousseau et quelques-uns de ses ministres, lorsque ceux-ci ont commencé à montrer de l’impatience en le voyant se perpétuer au pouvoir. Il dénonçait bien haut l’odieuse conspiration formée pour lui prendre son portefeuille : si elle triomphait, il n’était pas éloigné de croire que ce serait la fin de la République. Ce qu’il reprochait à ses prédécesseurs de lui faire, il le fait à ses successeurs, avec la différence que les premiers l’ont laissé tranquille pendant dix-huit mois et ne sont sortis de leur réserve que lorsqu’ils ont pu apprécier en toute connaissance de cause les beaux résultats de sa politique. Il ne saurait, lui, se montrer aussi patient. Dès la constitution du nouveau ministère, il lui a déclaré la guerre. Il n’a même pas attendu de le connaître pour prendre contre lui position de combat dans sa lettre à M. le Président de la République. Son but était de gouverner de la coulisse, où il consentait à rentrer pour quelques jours. Peut-être M. Waldeck-Rousseau a-t-il eu autrefois quelque prétention de ce genre, et a-t-il cru qu’après avoir désigné M. Combes pour lui succéder, il tiendrait dans ses mains et manœuvrerait à son gré les ficelles du mannequin. En quoi il s’est trompé. Mais son erreur était plus excusable que celle de M. Combes, si celui-ci a vraiment espéré faire jouer à M. Rouvier le rôle subordonné que M. Waldeck-Rousseau avait eu l’impertinence de lui réserver à lui-même.

Pour continuer la comparaison, M. Combes, se rappelant les assauts furieux que lui ont livrés quelques-uns des ministres de M. Waldeck-Rousseau, a chargé de livrer les mêmes assauts à M. Rou-