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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 26.djvu/664

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primitive, en y rétablissant la résidence de la royauté. Louis XVIII ordonna, dès son retour, d’importans travaux qu’interrompirent les Cent-Jours. Il fit même dresser un état des logemens, d’après lequel on eût vraiment pu croire que rien n’avait changé en France depuis 1789. Très vite, d’ailleurs, pour des raisons politiques autant que financières, ce projet de réinstallation de la Cour à Versailles fut abandonné. Tout se borna à divers travaux d’entretien et à la construction, par l’architecte Dufour, d’une aile faisant pendant à l’aile Gabriel, que Napoléon avait projeté de démolir ; à la bénédiction, par le prince de Croy, évêque de Strasbourg, de la chapelle restaurée ; à l’ouverture, sur l’emplacement de l’ancien bassin de l’Ile flottante, d’un agréable jardin, qui reçut le nom de jardin du Roi et qui rappelait quelque peu celui du château de Hartwell que Louis XVIII avait habité pendant son exil.

Beaucoup moins encore que son aîné, et malgré la frappe d’une belle médaille, due au graveur Michaud, sur laquelle on lit cette inscription : « Au Roi, Versailles qui l’attend, » Charles X n’entreprit de rendre à l’ancienne résidence des Bourbons quelque reflet de la splendeur qu’il lui avait connue, au temps de la bruyante jeunesse du Comte d’Artois. Pendant son règne, il ne fit qu’une seule visite au château, où l’on avait laissé s’installer d’anciens émigrés, qui trouvaient là, sans bourse délier, des logemens spacieux et commodes, qu’il fut un peu plus tard très malaisé de leur faire quitter. Pour Charles X, un souvenir, douloureux entre tous, s’attachait au nom de Versailles ; c’était celui de Louvel, l’assassin de son fils, né dans cette ville, ainsi que sa victime, le Duc de Berry, auquel un très beau monument, dû au ciseau de Pradier, fut érigé dans la cathédrale Saint-Louis.

Avant son dernier exil, le frère de Louis XVI et de Louis XVIII traversa, cependant, encore une fois Versailles, d’où il était déjà parti en 1789, donnant, l’un des premiers, le signal de l’émigration. Le 30 juillet 1830, forcé de quitter Saint-Cloud, Charles X vint coucher à Trianon, qu’il abandonna presque aussitôt pour Rambouillet, en apprenant que les troupes improvisées de l’insurrection triomphante se mettaient à la poursuite de la dynastie déchue. Quarante ans auparavant, c’était dans les jardins de Trianon, qu’elle ne devait plus revoir, que se trouvait Marie-Antoinette, lorsqu’un page lui avait apporté la nouvelle