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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 26.djvu/851

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traités comme le corps et le sang actuels de la victime. Les réformateurs, d’autre part, considéraient la sainte communion, non comme un sacrifice, mais comme une fête célébrée à la table du Seigneur, quoique pour la consécration des élémens, pour les effets de cette consécration et pour plusieurs autres points, ils diffèrent grandement entre eux. Le changement apporté dans la façon de considérer le sacrement, appelait naturellement un changement correspondant dans l’ancien autel. Il ne devait plus être un autel de sacrifice, mais seulement une table sur laquelle les communians prendraient part au Lord’s Supper[1].


Loin d’être abattus par les difficultés qu’ils rencontraient, les Ritualistes devenaient chaque jour plus entreprenans. Le Révérend Skinner défiait publiquement les poursuites[2]. Le Révérend Stuart, personnage considérable du parti, déclarait « très respectueusement » à l’évêque de Londres qu’il ne pouvait lui obéir en ce qui concernait l’allumage des cierges, et l’évêque en était réduit à exprimer son regret de cette désobéissance[3]. Même résistance de la part du Révérend Upton Richards, vicar de l’église All Saints, Margaret street, construite en place de la chapelle autrefois desservie par Oakeley[4]. « Je n’entends pas soutenir, écrivait-il à l’évêque, que l’usage des lumières soit, en aucune façon, essentiel ou ait, en lui-même, une vertu, mais je crois que c’est un des ouvrages extérieurs de la citadelle de l’Eglise, et qu’en luttant pour cet ornement, ainsi que pour tout autre rite que la loi de l’Eglise permet, je ne fais que lutter pour ces protections que la piété et la sagesse de nos pères avaient disposées autour des choses sacrées. » Aussi un catholique écrivait-il, dans une lettre publiée en 1857 : « Allez dans des églises comme S. Barnabas, Pimlico, et Sainte-Marie, Osnaburgh Street, et dites-moi en quoi elles diffèrent de nos propres églises[5] ? »

  1. Les cours consistoriales prétendent encore aujourd’hui appliquer cette jurisprudence, non parfois sans des tempéramens assez bizarres. Le Dr Tristram, juge de la cour consistoriale de Londres, avait, par application de cette règle, refusé d’autoriser l’érection d’un autel de marbre dans la paroisse S. Luke, Chelsea. Les paroissiens ne se sont pas découragés ; ils ont présenté un autel composé d’un cadre en bois recouvert de plaques de marbre. Par décision récente, rendue en août 1904, le Dr Tristram a bien voulu admettre que c’était la table en bois, seule légale aux yeux du Conseil privé. Une telle décision montre bien le terrain gagné par les Ritualistes, même devant les autorités les plus hostiles.
  2. The Romeward movement, p. 340.
  3. Life of Tait, t. I, p. 219 à 222.
  4. Ibid., p. 416 à 422.
  5. Union, 14 août 1857.