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n’a pas été notre satisfaction, de mettre à nu un petit singe admirablement momifié, et dont le corps ainsi que les membres étaient recouverts séparément de bandelettes très bien enroulées ! Mais le cou, la tête et la queue manquaient. Un cou et une tête savamment modelés en toile gommée remplaçaient ces organes absens. Le profil de la face, absolument humain, ressemble d’une manière frappante à celui d’un Indien de l’Amérique du Sud, avec un grand nez fortement busqué. Les avant-bras et les mains sont croisés sur la poitrine, les jambes fléchies comme celles d’un fœtus. La radiographie ainsi que la forme des ongles nous ont fait voir que nous n’avions pas sous les yeux une momie d’un jeune enfant, mais bien celle d’un Cercopithecus sabaeus, petite espèce simienne qui habite actuellement le Soudan et le Sennar, d’où on l’apporte fréquemment en Égypte.

Une autre momie de singe cercopithèque est encore plus intéressante. Les membres sont simplement recouverts par la peau desséchée. Les bras sont croisés sur la poitrine, tandis que les jambes rapprochées et étendues sont terminées par de véritables pieds humains admirablement modelés et fixés par des chevilles enfoncées dans les cous-de-pied.

Malgré la rareté des momies de singes dans les musées, nous pensions bien qu’il devait se trouver quelque part une nécropole réservée à leur ensevelissement. On citait Hermopolis, près de Roda, où cependant aucune fouille régulière n’avait été tentée. Dans sa grande carte des montagnes thébaines, Wilkinson indiquait trois tombes de singes au sud de ces collines rocheuses. Mais personne ne savait où pouvait bien se trouver cet emplacement assez vaguement dessiné sur une carte souvent incomplète et inexacte. Cette année même, au mois de février, après plusieurs jours de recherches et de sondages infructueux dans les nombreux vallons situés au sud de la vallée des Reines, nous avons eu l’heureuse chance de découvrir la nécropole des représentais du dieu Thot dans un ravin extrêmement sauvage qui se trouve tout au sud des rochers thébains, immédiatement avant la grande dépression dans laquelle passe la route de Farchout.

Cette vallée, des plus pittoresques, est bornée à droite et à gauche par d’énormes falaises formées de conglomérats quaternaires. C’est à la base de ces rochers que nous avons découvert des centaines de tombes renfermant des restes de singes