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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 27.djvu/542

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police de la ville de Versailles, nous trouvons le « rôle général de la taxe contributive et répartition faite sur les propriétaires des maisons bourgeoises et habitans de la ville de Versailles pour la subsistance et nourriture en pain des pauvres de ladite ville, arrêté le 15 mai 1709 en exécution de l’arrêt du Parlement du 19 avril 1709. » Sur cette taxe des propriétaires et bourgeois, tout le monde figure : le Roi pour 4 220 livres, Monseigneur pour 2 110 livres, le Duc de Bourgogne pour 397, le Duc d’Orléans pour 600, la Duchesse pour 300. Sept directeurs des pauvres avaient été choisis par les soins desquels les fonds ainsi recueillis furent employés en distributions de pain. Chaque pauvre recevait une carte avec un cachet, et lorsqu’il se présentait à la distribution, on lui donnait son pain et l’on faisait une entaille à sa carte avec des ciseaux. Les choses, comme on voit, se passaient avec beaucoup d’ordre, et les pauvres de Versailles furent ainsi nourris pendant six mois et demi[1].

Cette charité obligatoire et administrative ne pouvait suffire au Duc de Bourgogne. C’était le grand et noble côté de son caractère d’être extrêmement sensible aux misères populaires. Quand nous en arriverons à étudier ses projets de gouvernement, nous verrons qu’au point de vue fiscal, le soulagement du peuple fut toujours une de ses préoccupations principales. Mais le spectacle de ces misères qui s’étalaient sous ses yeux, de ces gens mourant de faim par les rues ou les chemins, de ces rassemblemens de femmes demandant du pain, ne pouvait manquer de l’émouvoir profondément. Il s’efforçait de parer à ces détresses par les seuls moyens qui dépendaient de lui, c’est-à-dire par d’abondantes aumônes. On en trouve le détail dans Proyart et dans un petit opuscule qui a pour titre : Mémoire des principales actions de vertu qu’une personne de probité a remarquées dans Monseigneur le Dauphin, et qui paraît avoir été composé par le curé de Versailles[2].

Comme il était naturel, c’était en effet envers les pauvres de Versailles, de Marly et des villages environnans que s’exerçait surtout sa charité. « Il étoit si persuadé de l’obligation de faire l’aumône, dit l’auteur de cet opuscule, qu’il m’a souvent dit que

  1. Journal de Pierre Narbonne, p. 8.
  2. Cet opuscule a été joint aux oraisons funèbres du Duc et de la Duchesse de Bourgogne, par l’évêque d’Alet, le Père Gaillard, le Père de la Rue et au Recueil de ses vertus par le Père Martineau.