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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 27.djvu/575

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intellectuelle que par le prestige de ses hautes qualités morales, une importance et une autorité qui s’imposaient même aux adversaires de ses idées. Suivant l’expression de lord Selborne, « son pouvoir, dans l’Église, était supérieur à celui d’un évêque ou d’un archevêque[1]. » Le plus grand nombre de ses coreligionnaires avaient fini par comprendre ce qu’ils gagnaient, aux yeux du monde, à se montrer comme éclairés du reflet de ses vertus. Aujourd’hui encore, Pusey est vénéré par beaucoup, comme le saint de l’Anglicanisme. Ses admirateurs ont fondé, en son honneur, à Oxford, une maison, Pusey House, où vivent en commun, dans la prière et l’étude, des clergymen chargés de garder sa mémoire et de continuer son apostolat. Là ont été transportés, comme de précieuses reliques, l’autel sur lequel il célébrait chaque jour l’Eucharistie, et l’image de la Sainte Face devant laquelle il avait l’habitude de prier.

À côté de Pusey, plusieurs autres High churchmen avaient aussi pris plus ou moins parti pour les Ritualistes : entre tous, un ancien Tractarien, dont l’intervention fut plus particulièrement remarquée, William Church. Les conditions dans lesquelles il avait été conduit à se prononcer, sont significatives et intéressantes à connaître. Il m’est arrivé, déjà plusieurs fois, de citer les réflexions que suggéraient, à cet observateur avisé, les phases diverses de la crise religieuse. Toutefois, jusqu’en 1871, du presbytère de campagne où il s’était réfugié et comme caché après la sécession de son très cher Newman[2], il n’avait assisté aux événemens qu’en spectateur un peu lointain et désabusé, soucieux de ne se mêler à aucun parti, de ne s’associer à aucune démarche, fuyant le bruit et le mouvement, détaché de toutes choses, sauf du soin de ses humbles paroissiens et de sa propre sanctification, ne communiquant avec le dehors que par les articles, toujours fort bien écrits et pensés, qu’il publiait sur des sujets littéraires ou religieux. À la fin de 1871, un changement brusque s’était fait dans sa vie : M. Gladstone était parvenu, non sans résistance de sa part, à l’arracher à sa retraite, pour l’élever au poste considérable de doyen de S. Paul, l’église cathédrale de Londres. Cette dignité le mêlait forcément aux affaires publiques. Placé bien en vue, sur le terrain où se livrait le plus vif de la

  1. Personal and political memorials, t. II, p. 72.
  2. Voir la Renaissance catholique en Angleterre au XIXe siècle, première partie, p. 158 ; seconde partie, p. 69.