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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 27.djvu/823

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un legs important. Au retour de la campagne de Flandre, elle avait, dans la mesure de son influence, travaillé à rapprocher le fils du père. De même elle avait contribué au mariage du Duc de Berry. Le Due et la Duchesse de Bourgogne n’avaient donc point à se plaindre d’elle, comme des autres personnages qui composaient les parvulos de Meudon. Les débris de la cabale de Vendôme, dont le principal personnage était d’Antin, continuaient de s’y réunir, et leurs sentimens vis-à-vis du Duc de Bourgogne n’étaient pas changés. Aussi ce dernier venait-il de plus en plus rarement à Meudon. Il s’y sentait toujours timide, gêné, « en brassière, » répète souvent Saint-Simon, et si Monseigneur se comportait toujours vis-à-vis de la Duchesse de Bourgogne en beau-père affectueux, il témoignait au Duc de Bourgogne une froideur marquée, réservant toutes ses tendresses et ses complaisances pour son second fils, le Duc de Berry, comme lui grand mangeur, grand chasseur, sanguin, emporté, bien qu’au fond d’humeur assez débonnaire, et vers lequel il se sentait attiré par ces ressemblances de nature.

Les choses en étaient là, et les deux cabales, contenues dans leur hostilité réciproque par l’autorité du Roi, continuaient à se miner sourdement quand, le 9 avril, le Roi apprit par d’Antin que Monseigneur avait eu le matin une faiblesse, et que,, vers six heures du soir, il avait une forte lièvre et semblait fort assoupi. Le lendemain, la petite vérole se déclarait. Le Roi se transporta immédiatement à Meudon, défendant au Duc et à la Duchesse de Bourgogne, ainsi qu’au Duc de Berry de le suivre, parce qu’ils n’avaient pas eu cette redoutable maladie. Mais Mme de Maintenon venait l’y rejoindre. A peine arrivée, elle recevait deux lettres, l’une du Duc et l’autre de la Duchesse de Bourgogne, qui tous deux paraissaient dans ces lettres encore plus préoccupés de la santé du Roi que de celle de Monseigneur. Voici en quels termes s’adressait à elle le Duc de Bourgogne : « Je prends, Madame, la liberté d’écrire au Roy sur une chose qui intéresse encore plus l’Estat que la santé de Monseigneur ; vous jugez aisément que c’est sur la sienne propre, il n’y a personne qui ne tremble, lorsque l’on pense que le Roy est exposé à tous momens à un air dangereux, non seulement pour la petite vérole, mais mesme pour donner d’autres maladies venimeuses et plus à craindre. Je sais, Madame, que le Roy se doit à sa famille, et je ne le sais que trop, par l’ordre qu’il m’a donné de ne me