Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 27.djvu/930

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ses membres pour la spécialiser dans un rôle technique.

Il n’y a déjà que trop d’officiers immobilisés dans des fonctions qui ne sont pas militaires. C’est ainsi que, dans les ports, le service des observatoires et des chronomètres, qui serait plutôt du ressort des ingénieurs, est confié à des officiers ; ce sont eux aussi qui y sont chargés du service des cartes avec toutes les manipulations et corrections que ce service entraîne. La formation des pilotes de la flotte, celle des patrons-pilotes pour torpilleurs immobilise également un certain nombre d’officiers qui sont appelés ainsi à faire œuvre d’hydrographes plutôt que de militaires. Enfin à Paris, les services des Instructions nautiques, des compas, de la météorologie nautique, services ayant de nombreux points de contact avec l’hydrographie et primitivement confiés à des ingénieurs, ont été, par suite de la pénurie de ceux-ci, successivement attribués à des officiers, au détriment de la rapidité de transmission et d’exécution des affaires qui se traitent souvent ainsi en double. En un mot, il y aurait intérêt à appliquer le grand principe de la division et de la spécialisation du travail, en réservant l’hydrographie et tous les services annexes qui s’y rattachent, observatoires, pilotages, à un corps technique suffisamment nombreux, de manière à laisser les officiers de marine à leur rôle militaire, le seul auquel, au fond, ils s’intéressent.

C’est ce qui se passe du reste presque partout à l’étranger ; et ici, comme dans beaucoup d’autres circonstances, la France qui avait tracé la voie aux autres nations s’est laissé devancer par elles.

Aucune des grandes marines ne consacre à son budget hydrographique une somme relativement aussi dérisoire que la nôtre. L’amirauté anglaise entretient couramment sept navires hydrographes qui font des levés sur tous les points du globe, aussi bien dans les eaux métropolitaines et coloniales que sur les côtes étrangères. Ces sept navires doivent correspondre à une centaine au moins de navigating officers ou d’hydrographers attachés aux différens services hydrographiques tant à terre qu’à la mer. Qu’est-ce auprès de cela que nos quinze ingénieurs et notre unique navire hydrographe, la Chimère, petit aviso de 250 tonnes, filant à peine ses six nœuds ?

Inutile de citer après cela les autres nations qui, comme les États-Unis, l’Espagne, voire le Portugal, ont des corps d’officiers ou « ‘ingénieurs hydrographes plus ou moins semblables au nôtre.