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incidens de la matinée du 28 mai et des motifs de la prompte reddition de la division Nebogatof. L’acte en lui-même n’avait rien de déshonorant ; on a le droit d’amener son pavillon après avoir fait tout ce qu’il était humainement possible de faire pour le défendre. Les ennemis des Russes se sont donné la tâche de dénaturer le caractère de cette capitulation et d’en faire l’exclusif résultat de l’affaiblissement des notions les plus élémentaires de patriotisme et de devoir militaire[1]. S’il en avait été réellement ainsi, nous devrions encore, avant de juger nos alliés, nous rappeler les malheurs du même genre qui frappèrent notre marine pendant la période révolutionnaire, et nous rappeler aussi combien la discipline fut en péril sur nos bâtimens, il y a bien peu de temps encore. Et quand il faudrait reconnaître la vérité des scènes dont on prétend que quelques vaisseaux russes furent le théâtre, la Russie n’en aurait pas moins, pour se consoler des honteuses faiblesses de quelques-uns des siens, les fortifians souvenirs de la belle conduite de la plupart des équipages de l’escadre vaincue. Des combats comme ceux du Borodino, du Kniaz-Souvorof, du Sissoï-Veliki, de tant d’autres encore, honorent une marine et ne permettent pas de désespérer de son relèvement.

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  1. L’analyse qui vient d’être publiée du rapport de l’amiral Rodjestvensky confirmerait les bruits qui ont couru sur l’insubordination des équipages du Seniavine et de l’Apraxine. Nous avons dit plus haut les doutes que nous inspire l’authenticité d’un document qui fait tenir au commandant en chef de la flotte russe un langage peu mesuré.