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voyait déjà une « sixième fille, » sachant bien qu’elle n’en pourrait trouver une dont le cœur, l’âme, l’esprit, dussent promettre plus de paix et d’honneur à ses vieux ans, et plus de bonheur à son fils. « Il est impossible d’avoir conçu plus d’admiration, d’estime et d’attachement que j’en ai pour vous. Permettez-moi de vous le dire, sans un cérémonial qui semblerait ne pas convenir à mes sentimens pour vous. » Cette lettre ajouterait, s’il était besoin, à ce que nous savions déjà de la délicatesse et de la bonté de cette mère exquise. Plus on pénètre dans l’intimité de cette famille des Lamartine, et plus on est gagné au charme qui s’en dégage, fait de simplicité et de bonne grâce, de vertu solide et aimable, avec un parfum d’ancienne France et je ne sais quelle saveur rustique.

Dès qu’il put recommencer à écrire, les premières lignes que traça Lamartine furent pour la jeune fille[1] :


C’est moi, chère Marianne. Mais ce n’est qu’un mot, et le premier que j’écrive depuis près de quarante jours. J’ai été bien mal et bien longtemps persuadé que je ne vous reverrais plus en ce monde. Je ne regrettais que deux personnes en mourant, ma mère et vous, à cause du chagrin que vous auriez toutes deux. Je ne me remets pas vite, et, depuis quelques jours surtout, j’éprouve les mêmes accidens qu’en commençant ; cependant j’espère pouvoir bientôt parler. Je ne sais plus où en sont mes affaires de tout genre, mais je me résigne et je compte, si je dois vivre, sur la Providence qui saura pour nous, comme pour tout, tirer le bien du mal. Je vous aime toujours et toujours plus, à mesure que la réflexion vous fait mieux apprécier. Je vivrai ou mourrai dans ces mêmes sentimens, gardez-moi les vôtres aussi invariablement. Adieu, en voilà beaucoup pour mes forces.


Rue de Joubert, 28, Chaussée-d’Antin.

Cependant le convalescent s’informait de ses « affaires de tout genre ; » sa joie fut grande de découvrir que, pendant sa maladie, elles avaient beaucoup avancé, et qu’elles se trouvaient présentement dans l’état le plus satisfaisant.


LAMARTINE ATTACHÉ D’AMBASSADE. — MADAME BIRCH S’HUMANISE

Grâce au zèle de ses protecteurs, il venait d’obtenir le poste tant souhaité ! Il avait une position. Il devenait un gendre présentable. Il s’empressa de faire part à Mme Birch de cette

  1. « Mademoiselle Marianne Birch, pour elle seule. »