Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 29.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

concorder cette initiation au parlementarisme avec les inquiétudes de la guerre et avec les émotions inséparables des négociations pour la paix. Mais aujourd’hui que la paix est faite, pourquoi attendre davantage ? Il semble que l’heure soit favorable pour établir entre le pays et l’Empereur la collaboration que celui-ci a déclarée nécessaire, et c’est beaucoup de choisir le bon moment.


La question marocaine, toujours pendante entre l’Allemagne et la France, n’a pas fait un pas appréciable vers la solution. Les derniers incidens se rattachent à deux ordres de faits très distincts. D’une part, l’Allemagne négocie avec nous en vue d’une entente à établir sur le programme à soumettre à la future conférence ; de l’autre, elle travaille et intrigue à Fez en vue d’obtenir de la complaisance, de la faiblesse, ou de l’intimidation du Sultan, ce qu’il faut bien appeler des avantages particuliers. Ce double jeu n’est pas fait pour améliorer notre situation réciproque. Une note officieuse, émanant du ministère des Affaires étrangères, a paru, il y a quelques jours, dans la presse : elle rappelle qu’au moment où nous avons accepté de nous rendre à la conférence, il était ou il semblait entendu que la France et l’Allemagne s’abstiendraient également de rechercher au Maroc toute modification préalable du statu quo à leur avantage. Le gouvernement impérial ne le conteste pas : il se borne à dire que, si la construction du môle de Tanger a été concédée à une maison allemande, c’est en vertu d’une revendication qui avait été faite avant les derniers événemens à la suite de vexations dont un de ses sujets avait été victime, et que si le Sultan a conclu un emprunt de dix millions avec des banquiers allemands, il ne s’agit pas là à proprement parler d’un emprunt d’État, mais bien d’un emprunt fait par le Sultan à titre personnel. Il ajoute, ce qui contredit sa thèse, que tous les emprunts marocains, y compris l’emprunt français, seront confondus plus tard par la conférence dans un emprunt de liquidation au moyen de l’établissement au Maroc d’une banque internationale. On comprend que de pareilles explications soient loin de nous satisfaire. Si notre acceptation de la conférence devait avoir pour conséquence un arrêt immédiat dans les entreprises des deux puissances à Fez, il est évident qu’au moins d’un côté, cette condition n’a pas été remplie et que, dès lors, nous serions en droit de reprendre notre parole. Quant au programme de la conférence, le gouvernement allemand nous a priés d’en rédiger le projet. Nous l’avons rédigé et le lui avons transmis. Il l’a étudié alors à tête reposée pendant longtemps, et l’a