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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 29.djvu/481

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a pas là un intérêt égal entre les puissances, il y a un intérêt français et marocain. Le gouvernement allemand ne le méconnaît point. Aussi ne s’agit-il pas, dans sa pensée, de porter la moindre atteinte à notre droit ; ce droit est ce qu’il est, et il sera certainement respecté par la conférence. Dès lors, demande-t-on, pourquoi les conditions dans lesquelles il s’exerce ne lui seraient-elles pas soumises ? Si l’exercice de son droit résultait désormais pour la France d’un mandat international, il aurait acquis là un supplément d’autorité et de force : il n’y aurait pas là un affaiblissement.

C’est ainsi qu’on cherche à nous tenter, avec de bonnes dispositions, nous n’en doutons pas, avec une parfaite sincérité, nous en sommes sûrs, mais avec des argumens qui ne sauraient nous toucher. Le gouvernement allemand obéit à une tendance qui lui est naturelle, et qui consiste à tout soumettre à la conférence. Plus celle-ci est inutile, plus il cherche à relever son importance en corsant le programme de ses travaux. Nous voulons bien le suivre dans cette voie, mais jusqu’à un certain point seulement, et ce point est atteint lorsque nous rencontrons des intérêts purement français et marocains. Si ces intérêts étaient nouveaux, s’ils n’avaient pas été l’objet de plusieurs négociations diplomatiques qui ont donné lieu à plusieurs traités ou conventions, on pourrait encore comprendre que la conférence fût saisie des questions qui s’y rattachent. Mais on a vu qu’il n’en était rien. L’Allemagne est à l’égard du Maroc dans une situation différente de la nôtre et aussi de celle de quelques autres vieilles puissances, comme l’Espagne et l’Angleterre. Elle cherche à se créer des intérêts au Maroc, ce qui est son droit ; mais elle n’en a pas eu beaucoup jusqu’ici, et, ses rapports antérieurs avec le maghzen ayant été à peu près nuls, elle n’éprouve aucune difficulté à tout porter devant la conférence. Nous ne sommes pas dans le même cas, et cela explique l’opposition que nous sommes obligés de faire à l’idée de rendre la conférence juge en nouveau ressort de ce qui est déjà jugé et réglé. La conférence a un vaste champ devant elle, c’est l’avenir : le passé ne lui appartient pas. Beaucoup de puissances auraient, comme nous, des objections à s’y rendre le jour où on leur dirait que leurs traités avec le maghzen pourraient y être évoqués, ne fût-ce que pour y être confirmés, et pourquoi ferait-on à notre égard ce qu’on n’aurait même pas la pensée de faire à l’égard des autres ? Il y a des réformes à introduire au Maroc ; le programme de la conférence les énumère ; Il ne doit pas aller plus loin. Tous les traités, tous les arrangemens antérieurs doivent être maintenus tels qu’ils sont, jusqu’à ce qu’ils