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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 29.djvu/582

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Les assurances pacifiques de M. Thiers finirent par avoir raison des inquiétudes allemandes. Le roi de Prusse voulait sincèrement la paix. Le parti militaire céda. En juin 1872, fut signée une convention d’après laquelle Belfort devait être évacué en même temps que les départemens de la Meuse et de la Meurthe, quand le troisième et dernier milliard de l’indemnité de guerre serait payé. M. Thiers obtint, à ce moment, que non seulement les territoires occupés ne recevraient jusqu’à leur libération aucune nouvelle troupe, mais qu’il ne serait construit dans les places fortes aucun ouvrage de fortification. Cette dernière clause visait Belfort où les Allemands avaient entamé quelques travaux.

Plus tard, quand l’abondance de nos ressources financières permit à M. Thiers de fixer au 1er septembre l’échéance du payement du cinquième milliard, il demanda à la Prusse l’évacuation de Belfort pour le 1er juillet, en même temps que des départemens de la Meuse, de la Meurthe, des Vosges et des Ardennes. Mais le Roi maintint son intention de conserver Belfort jusqu’en septembre comme gage de l’acquittement final de la dette française, et M. de Bismarck, tout en se défendant d’avoir une arrière-pensée quant à la rétrocession de la place, fit savoir à M. Thiers que l’acceptation de la clause la concernant était la condition sine qua non de l’évacuation en juillet des quatre départemens. Il était évident, comme le fait observer M. Thiers, qu’en séparant ainsi le sort de Belfort de celui des quatre départemens, les Allemands se mettaient dans le cas de le faire dépendre « d’un accident ou de quelque interprétation subtile des textes. »

M. Thiers ne se tint pas pour battu. Il commença par accepter la clause relative à Belfort, puis soumit au chancelier la solution d’une question financière d’importance secondaire, en ajoutant que si elle était acceptée, la France serait en mesure de s’acquitter intégralement le 1er août, et que, dans ce cas, les Allemands évacueraient à cette date Belfort et les quatre départemens.

Sur ces entrefaites, M. de Bismarck proposa spontanément de substituer Verdun ou Toul à Belfort, comme gage équivalent, et d’évacuer Belfort en même temps que les quatre départemens. M. Thiers accueillit avec joie cette offre inespérée. Verdun fut substitué à Belfort.

Quelques jours après, le chancelier fit mine de revenir sur