nécessairement l’intérêt d’un pareil journal et le rend à peu près nul pour le bien. Il est fâcheux cependant qu’il n’existe aucune feuille périodique entièrement pure. C’est la raison du silence qu’on a gardé forcément sur les critiques odieuses faites de l’ouvrage de M. de Maistre[1]. On m’avait envoyé une réponse à ces critiques pour être insérée dans le Drapeau blanc, le moins inaccessible des journaux dits royalistes. M. O’ Mahony[2], un des rédacteurs, n’a pu encore l’y faire insérer. Ab uno disce omnes.
M. le comte de Senfft, M. de Saint-Victor, et tous vos amis vous offrent leur respectueux souvenir, et moi l’hommage de mon inviolable et bien tendre affection.
F. DE LA MENNAIS.
Paris, 9 octobre 1821.
J’ai enfin reçu, Monsieur et respectable ami, les deux ouvrages que vous m’aviez destinés, et dont je vous remercie. Celui qui regarde les Missions protestantes a été lu par M. Picot qui doit en parler dans son journal. Vous verrez dans l’un des prochains Défenseurs, une lettre de moi à un protestant qui m’avait prié de prendre cette voie pour lui répondre[3]. Il y a parmi tous ces gens-là un grand ébranlement. L’Europe serait catholique dans dix ans, si les Princes voulaient. Mais ils aiment mieux tomber avec leurs trônes ; ils préfèrent à la houlette du Souverain Pontife la hache du peuple souverain.
Qu’est-ce que ces deux apostasies, dont se vante l’auteur de la lettre à M. Gœrres[4] ? Je soupçonne que ses réticences cachent quelque chose de peu honorable au protestantisme.
- ↑ Joseph de Maistre était mort le 25 février précédent. Son livre du Pape avait paru en 1819. L’Église gallicane et les Soirées de Saint-Pétersbourg sont posthumes (1821). L’abbé Baston, dont les curieux Mémoires ont été publiés récemment par les soins de la Société d’histoire contemporaine (3 vol., 1897-1899), au lendemain même de la mort de l’illustre écrivain, publiait à Lyon contre lui un pamphlet sous ce titre : Réclamation pour l’Église de France et pour la vérité, suite de l’ouvrage de M. de Maistre intitulé : Du Pape et de sa suite.
- ↑ O’Mahony deviendra plus tard, en qualité de rédacteur de l’Invariable de Fribourg, l’un des adversaires les plus irréconciliables de Lamennais.
- ↑ Cette Réponse à un protestant a été reproduite dans les Seconds mélanges, de Lamennais (1826), et réimprimée au tome VIII, p. 76-84, de l’édition des Œuvres complètes de Lamennais (Cailleux, 1836-1837).
- ↑ Jean-Joseph Gœrres (1776-1848). La Mystique chrétienne (1836-1842) a été traduite en français en 1855 par Éloi Jourdain, dit Charles Sainte-Foi, un ancien disciple de Lamennais (1806-1861). Voyez, sur Gœrres, G. Goyau, l’Allemagne catholique, I, p. 316-366, et II, p. 56-114.