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absence, vous pouvez donner les deux derniers volumes de l’Essai à 12 francs au lieu de 14 francs, et l’Imitation à 2 fr. 50 au lieu de 3 francs papier commun et à 3 fr. 50 au lieu de 4 francs papier vélin. Mon frère tâchera de trouver des honoraires de messes pour faciliter la vente de ces livres. Vous voudrez bien vous rembourser des frais de port sur ce que vous me devez.

Je ne puis vous rien dire de positif au sujet des petits Frères. Si cela est possible, cela se fera. Je vais en écrire à mon frère qui vous répondra directement.

J’ai été retenu ici plus longtemps que je ne pensais, et pour des affaires désagréables. Je crois, grâce à Dieu, qu’elles touchent à une fin. La chose n’est pas de nature à être expliquée dans une lettre.

Seulement je vous dirai que vous jugiez mieux que moi l’homme de la rue du Cherche-Midi[1]. Je me suis heureusement éclairé à temps, et avec de la fermeté je me suis tiré d’affaire. Mais nous causerons de cela quand nous nous verrons.

Il me semble que vous faites bien de ne pas venir à Paris cet hiver. Le moment n’est favorable pour aucun genre de bien. Tout va de mal en pis. La conspiration anti-chrétienne, plus ardente que jamais, marche le front levé, sans que le gouvernement s’en inquiète. Il la sert même en beaucoup de points. Nous sommes menacés pour l’année prochaine d’une loi sur les mariages funeste à la religion. J’espère encore cependant qu’elle ne sera point présentée, parce que les ministres ne voudront point multiplier leurs embarras. Le ministère ecclésiastique est resté de fait à l’Intérieur. L’év[êque] d’Hermop[olis] ne fait rien, absolument rien[2], qui n’ait reçu auparavant l’approbation de Corbières[3]. L’éducation est pire que jamais. Des détails vous effraieraient. Nous vivons dans un triste temps, mais l’avenir sera plus triste encore.

J’espère pouvoir partir pour la Bretagne dans les premiers jours de janvier. J’emmène avec moi l’abbé Gerbet[4]. Il se portera mieux à la campagne, et travaillera davantage.

  1. Il s’agit ici de Saint-Victor.
  2. Frayssinous (1765-1842), qui dirigea les affaires ecclésiastiques de 1824 à 1828.
  3. Le comte de Corbières (1766-1853) était alors ministre de l’Intérieur.
  4. L’abbé Gerbet (1798-1864), sur lequel Sainte-Beuve a écrit un si joli article (Lundis, t. VI), fut l’un des disciples de la première heure de Lamennais. Il devint en 1853 évêque de Perpignan.